Les sondeurs, qui comme chacun sait décident en lieu et place de l’électeur du résultat des élections, ont depuis longtemps déjà rendu leur verdict : le second tour de l’élection présidentielle opposera Sarkozy à son clone DSK, et DSK gagnera… 59 à 41 ! La branlée !
On rappellera utilement, et cela s’applique à moi comme aux instituts de sondage, que faire des pronostics à 2 ans d’une élection présidentielle est un exercice périlleux. On a vu en 1995 comme en 2002 ce qu’il est advenu. Mais peut-être la technologie médiatico sondagière a-t-elle fait des progrès, notamment dans l’intoxication des masses et le caractère autoréalisateur des pronostics sondagiers.
Les sondages ne sont que le prolongement des médias, qui sont majoritairement, comme chacun sait, les antennes de multinationales voraces ou de fonds de pension sans scrupules. C’est leur travail de faire élire un président servile, qui défendra leurs intérêts contre ceux du peuple. Après, qu’il soit de droite ou de «gauche», qu’il s’appelle Sarkozy ou DSK, du moment qu’il ne s’appelle pas Besancenot ou Mélenchon…
Avant même de se poser la question qui fait l’objet du titre de ce billet, on pourrait même s’en poser une autre au préalable : et si Sarkozy n’était pas au premier tour ? Car parmi ses innombrables défauts, il y a l’orgueil, et je le vois mal non pas courir le risque de perdre - on n’en est même plus là - mais aller au casse-pipe, vers une branlée assurée.
Mais bon, admettons (comme disait son ami Bigard à propos d’une chauve-souris) : il se présente en 2012. Mais dans quel état ? Ça fait deux ans que je pronostique ici même qu’il finira son quinquennat en slip. Et on commence effectivement à jauger l’état du slip : il ressemble de plus en plus à celui du «Gros Dégueulasse» de Reiser ! (Pour les malheureux/ses qui ne connaîtraient pas ce joyau de la bande dessinée, c’est «jaune devant et marron derrière»). Et de plus en plus élimé, effiloché et troué au fur et à mesure que le temps passe. Non, sérieusement, vous croyez vraiment qu’il se présenterait dans cet attirail ? Hum…
Mais bon, admettons, qu’on a dit. Alors voilà, il se présente…
Il est d’usage qu’un élu sortant fasse état, en guise d’argument massue, de son bilan. Mais là… Quelle que soit la manière dont on le présente, le «bilan» de Sarkozy n’est pas un bilan : c’est un réquisitoire ! Un naufrage, une apocalypse ! C’est bien simple, il a TOUT raté. TOUT, ABSOLUMENT TOUT. Impossible de faire en un seul billet une liste exhaustive de tous ses échecs, puisque des blogueurs talentueux y consacrent un billet quasi quotidien depuis plus de trois ans.
Alors faute de bilan, Sarkozy essaie péniblement de recycler ses vieilles méthodes éculées qui ont si bien fonctionné en 2002 et en 2007. Les cités, les Roms, les récidivistes, les faits divers… Sauf que là… Plus personne ne peut y croire. Sarkozy est responsable directement ou indirectement de l’évolution de la délinquance depuis 2002, et personne, sauf les truqueurs de chiffres sans vergogne, ne peut affirmer que la sécurité globale s’est améliorée depuis lors. Au contraire.
Qui peut sérieusement croire que les grotesques agitations sécuritaires médiatiques de cet été auront la plus minuscule influence sur la délinquance ?
Suffirait-il d’un claquement de menton martial et de quelques apparitions de la triplette infernale Hortefeux-Besson-Estrosi pour faire disparaître le trafic de drogue dans les cités ou le vol à la tire dans le métro parisien ? Si oui, pourquoi ces phénomènes perdurent-ils ?
La lutte contre la délinquance ne peut se concevoir que sur une longue période, et repose sur deux piliers. Le premier est la répression, le second est l’éducation.
La répression est le métier de la police (ou de la gendarmerie), c’est un métier comme un autre, il devrait s’effectuer dans l’indifférence générale, et en tout cas loin de la Une des médias. Que la police fasse une descente dans une cité, dans un camp de Roms, ou n’importe où ailleurs, pourquoi pas ? C’est son boulot, comme le boulanger fait son pain et l’infirmière ses piqûres… A-t-on déjà vu les caméras débarquer en masse pour voir le boulanger pétrir et l’infirmière piquer (à part Roselyne Bachelot…) ? A-t-on déjà vu tous les médias commenter la prochaine fournée ou une prise de sang ?
Plus drôle, si l’on peut dire, le gouvernement qui ne parle que de répression et d’opérations policières, fait en réalité subir aux flics le même sort qu’aux autres fonctionnaires : la diète ! Ces braves pandores n’ont absolument plus les moyens de leurs missions. Sarkozy leur a tellement coupé les crédits que les effectifs sont en chute libre, il n’y a plus un radis pour payer les heures sup (innombrables) et qu’ils ne peuvent même plus changer les pneus ou simplement mettre de l’essence dans leurs bagnoles… Ce sont les malfaisants dont Sarkozy prétend protéger les “honnêtes gens” qui doivent se marrer !
L’éducation, qu’en dire ? Comment s’étonner que des gamins dealent du shit quand le seul avenir qu’on leur propose est le chômage dans des ghettos innommables ? Quand parallèlement la pub et l’époque les ont rendus matérialistes jusqu’à la caricature ? Quand on coupe les vivres de l’Éducation nationale ou des associations ?
Privilégier la répression (ou faire mine de) en sacrifiant l’éducation, ça revient à fanfaronner et se vanter de vouloir assécher une flaque d’eau avec une serpillière trouée sans toucher au robinet qui coule juste au dessus, et au contraire en l’ouvrant encore davantage.
Et pourtant, contre toute évidence, Sarkozy persite à brandir sa marionnette de pourfendeur de «l’insécurité». Et l’été 2010 a été celui des Roms. Au fait, pourquoi des Roms ?
Sont-ce les Roms qui vont nous obliger à travailler plus longtemps ?
Sont-ce les Roms qui ont foutu des millions de personnes au chômage sans aucun espoir de les en sortir ?
Sont-ce les Roms qui ont commandé 20 fois trop de vaccins ?
Sont-ce les Roms qui se sont érigés en sauveurs de l’Humanité avec cette foutaise de Grenelle de l’environnement avant de jeter le masque avec un «plan de relance» qui consiste à construire n’importe où des n’importe quoi subventionnés et n’envisager l’avenir qu’en terme de nucléaire, d’OGM et de «croissance» infinie?
Sont-ce les Roms qui font qu’il n’y aura bientôt plus d’hôpitaux, de buraux de Poste, de gares ou de tribunaux à la campagne ?
Sont-ce les Roms qui se prennent pour Georges Bush en allant faire la guerre en Afghanistan et sont responsables de l’assassinat d’un otage français ?
Sont-ce les Roms qui font construire des bagnoles à 4 sous en Roumanie pour les revendre en France avec un succès grandissant, alors que les usines ferment en France ? Sont-ce les Roms qui ont donné des milliards à ces mêmes constructeurs ?
Sont-ce les Roms qui font payer la «crise» aux victimes et, non contents d’épargner les coupables, leur flattent la croupe ?
Sont-ce les Roms qui avantagent éhontément leurs amis du Fouquet’s et les grandes fortunes tout en condamnant les manants à subir «la rigueur» ?
C’est pourtant simple, même si TOUS les Roms se mettaient à devenir voleurs de poules, de larfeuilles, de téléphones portables ou de parcmètres, jamais ils n’arriveront à soustraire aux contribuables français le centième de ce que la seule Madame Bettencourt a soustrait aux impôts avec la complicité active de nos politiciens de droite pourfendeurs de Roms (pour mémoire 2,5 milliards d’euros en 10 ans).
Sarkozy n’a fait qu’appliquer avec une détermination arrogante les règles de base du libéralisme économique : tout pour le privé, rien pour le public. Tout le reste (les chiens dangereux, les tests ADN, la Grippe A, les Roms…) n’est que grossière fumée destinée à saturer les médias et cacher l’objectif principal.
Cela aurait pu marcher, d’ailleurs. Sauf que, pour toutes les raisons énoncées précédemment, ce n’est plus crédible, et que d’ailleurs personne n’y croit plus.
Villepin se délecte en faisant la Une du Monde par une formule prétendument «choc» : il y a une tache de honte sur notre drapeau. Villepin utilise pourtant un euphémisme : à ce niveau-là, ce n’est plus une tache, mais carrément un drapeau dégoulinant de honte ! Même si à ce sujet, je suis plus optimiste que lui : Sarkozy a un rôle calamiteux pour l’image de la France, mais c’est provisoire… Il est tellement petit et minable que les étrangers ne peuvent pas sérieusement identifier Sarkozy à la France ! De Gaulle incarnait la France. Quand il parlait, c’était la France qui parlait. Quand Sarkozy parle, c’est tellement ridicule que les étrangers voient bien qu’il ne s’agit que des élucubrations d’un petit paltoquet que personne ne peut prendre au sérieux…
Néanmoins, ça sent la curée. Que Villepin règle ses comptes à coup de croc de boucher, rien d’étonnant. Mais Sarkozy doit être plus surpris de voir Rachida Dati, sa créature catastrophique, se retourner contre lui ! Jusqu’à Christine Boutin et ses curés, pape compris, pour lesquels il a tant fait, qui s’essuient désormais les pieds dessus…
Et ce n’est que le début. De la même manière que Sarkozy avait trahi Chirac avant l’élection de 1995, ils vont être nombreux à rejoindre Villepin au fur et à mesure que la déculottée se précisera encore plus.
Bon, un électeur de Sarkozy, ce n’est pas toujours accessible aux raisonnements logiques, et ça ne se distingue pas forcément par sa compréhension lucide d’une situation. Il se trouvera donc toujours une grosse poignée d’épais connards qui voteront pour lui. Ajoutés à ceux qui se tromperont de bulletin, il pourrait ainsi frôler les … 15%. Vous ne me croyez pas ? Démonstration.
Passons en revue les probables candidats.
Bayrou : elle est loin la période dorée de 2007 où il pouvait encore espérer arriver au second tour puis jouer les arbitres. Même si les conneries de Sarkozy le remettent un peu en selle, il devra subir la concurrence de Villepin. Il aura bien du mal à dépasser les 5%. Allez, 7.
Villepin : Grosse inconnue là encore. Aucune référence, puisqu’il ne s’est jamais présenté à une élection. Mais en spéculant sur l’amnésie des électeurs, en imitant bien De Gaulle, et en profitant lui aussi de la déconfiture de son “grand ami” Sarkozy et en bénéficiant donc des ralliements progressifs d’ex-sarkozystes attirés par la bonne odeur de la soupe, sans oublier celui de Dupont-Aignan, il peut atteindre les 15%.
Mélenchon : sa notoriété a certes fait un bond, mais j’ai toujours du mal à penser qu’il puisse faire admettre sa carrure présidentielle au delà de son cercle restreint d’aficionados. Allez, 7%.
Eva Joly : vu le contexte «Woerthien», c’est une candidature qui s’impose. Et si Cohn-Bendit ne fout pas en l’air l’attelage avec Duflot, ça peut faire 15%…
DSK : depuis 1981, le PS a toujours fait entre 23 et 34. Même si les zécolos et le PG vont lui bouffer des voix, DSK va aussi récupérer des voix de droite. Ce sera en plus le chouchou des médias. La nullissime Marie-Ségolène Royal avait fait 25% contre un Sarkozy au sommet de sa forme. Je vois mal DSK faire moins avec un Sarkozy en slip. Mettons 25.
Marine Le Pen. Sans le talent de tribun de son père, elle ne risque guère le deuxième tour non plus. Mais avec tous les efforts de Sarkozy pour la remettre en selle, elle peut arriver à 12%.
Autres : Lutte ouvrière sans Arlette n’est plus qu’un groupuscule, le PCF a disparu, Schivardi va sûrement doubler son score grâce à Canteloup mais ne dépassera pas les 1%, Besancenot est passé de mode. Allez, un forfait de 5%.
Soustraction : 100-7-15-7-15-25-12-5=14 ! Quatorze !
Et voilà, une hypothèse réaliste avec Sarkozy à moins de 15%, devancé par DSK et Eva Joly et au coude à coude avec Le Pen et Villepin. Même si, au risque de me répéter, je ne crois pas une seconde qu’il puisse prendre ce risque et je pense qu’il ne se représentera pas.
La déroute méritée de Sarkozy ne peut évidemment que nous réjouir. Un deuxième tour DSK-Joly aurait certes de la gueule. Sauf que DSK gagnerait 70-30… Et qu’une fois élu, nettement plus futé que son prédécesseur, il ne s’occuperait certes plus des Roms. Mais pour le reste, il est à craindre que rien ne change, hélas…
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