La Nouvelle République, Janvier 1977

Après ce petit voyage aux Etats Unis avec Deep Throat, retour en France, du moins dans le texte, quoique de manière rapide: nous partons en...1974, avec le carton cinématographique de cette année là: Emmanuelle.
Au moment du tournage de ce film (Décembre 1973- Mars 1974), nous sommes encore dans la France de Pompidou, de l'ORTF et du Carré Blanc. Mais nous sommes surtout dans la France d'après 1968, avec ses boulversements sociétals: la libération des moeurs. Le carton planétaire de Gorge Profonde nous a bien montré que notre Hexagone n'est pas le seul emporté par cette révolution des moeurs. La femme cherche à se libérer par divers moyens d'actions, les tenus choc des "sixties" sont devenues la norme (comme les mini jupes par exemple ou encore la coiffure tout simplement), tandis que l'Eglise catholique constate année après année ses reculs et pertes d'influence: la France de Papa a vécue.
Le film sort en Juin 1974. Donnée importante vue les changements politiques majeurs qui ont touché la France. En effet, Pompidou casse sa clope (c'était un grand fumeur, mais il n'est pas mort de cela), le 2 avril 1974. Des élections présidentielles sont organisés en mai: les gaullistes, officiellement représentés par Chaban Delmas (premier ministre de Juin 1969 à Juillet 1972), voient l'Elysée leur glisser des mains, au profit d'un libéral Giscard, vainqueur de Mitterrand avec 400.000 voix d'avance. Le programme de Giscard prône "la decrispation": majorité à 18 ans, éclatement de l'ORTF et surtout l'IVG (qui sera mis en place après la loi du 17 Janvier 1975
C'est dans cette France nouvelle que "Emmanuelle" va conquérir le coeur des Français, mais aussi celui des étrangers. Au box-office de l'année 1974 en France, "Emmanuelle" de Just Jaeckin occuppe la première position avec plus de 8,8 millions d'entrées.

A la semaine prochaine pour la suite des aventures d'"Emmanuelle".

Giscard, élu après le décès de Pompidou en 1974, doit affronter la crise économique, qui est due au choc pétrolier de 1973, ainsi qu'à d'autres phénomènes. L'inflation est à deux chiffres, et Raymond Barre tente de la combattre par tout les moyens, qui se révèlent peu efficaces. Le chomage touche la France, pour la première fois depuis 1945: ainsi fin 1976, le cap du million de chomeurs est franchi.
Dans le pays, le mécontentement est grand. En face, la gauche est unie par le Programme Commun de Gouvernement depuis Juin 1972: PS, PC et MRG sont alliés, et passent des accords en vue des élections: ainsi veulent-ils affronter le premier tour unis, éviter d'avoir des primaires à gauche, malgré quelques tiraillements entre Marchais et Mitterrand.
A Poitiers, les choses évoluent: Pierre Vertadier, maire depuis 1965, fait le choix de ne pas se représenter, apparement poussé vers la sortie par ses fidèles...
Une ville qui a changé avec une évolution majeure: l'A 10 est arrivée à Poitiers en 1976, ce qui ouvre un peu plus la ville. Les halles styles Baltard furent détruites et de nouvelles ont été ouvertes en 1976, non sans mécontenter les marchands. La Pénétrante arrive en ville depuis cette même année, alors que le quartier de Beaulieu sort de terre depuis 1975.
Politiquement parlant, nous avons une reconstruction de la situation nationale: la gauche part au combat unie. La liste d'Union de la Gauche est dirigée par Jacques Santrot (38 ans), et prend pour nom "Avec Vous Changeons Poitiers". A droite, la majorité, malgré quelques tiraillements, se présente sous l'égide de Jacques Grandon (51 ans), dans la liste "Poitiers Chance Nouvelle", liste dans laquelle on retrouve les noms de Jean-Yves Chamard ainsi que de Jean-Pierre Raffarin. Grandon est 1er adjoint depuis 1971, mais se présente sans le soutien de son futur ex-superieur hiérarchique. Enfin, à 30 minutes de la cloture du dépot des listes, le 4 mars 1977, une liste d'inspiration jobertiste se présente: "Poitiers Avenir", dirigée par Guy Gouiller.
Encore une fois la presse locale affirme que la campagne fut sans passion, comme en 1971, à la différence que leur attention a été attiré par la " Bataille de Paris": pour la première fois depuis la Commune de 1871, Paris va se doter d'un maire élu par le peuple; la bataille oppose d'Ornano (giscardien et ministre) à Chirac (député de Corrèze, président du RPR qu'il a fondé en décembre 1976) .Le 1er tour a lieu le 13 Mars 1977:

	1er tour 13 Mars 1977
Bureau de vote	Inscrits	Votants	Exprimés	Liste P.C.N.	Liste A.V.C.P.	Liste P.A.
Condorcet 1	1406	1021	993	436	500	57
Condorcet 2	1390	1010	982	406	522	54
Condorcet 3	1362	1015	997	388	562	47
Condorcet 4	1396	1035	1002	408	514	80
Montmidi 5	1569	1101	1081	503	507	71
CANTON I	7123	5182	5055	2141	2605	309
Jardin des plantes 6	959	652	627	349	250	28
Jardin des plantes 7	904	623	601	328	243	30
Charles Perrault 8	1595	1116	1099	390	634	75
Charles Perrault 9	1461	986	968	373	536	59
Charles Perrault 10	1384	933	919	314	540	65
CANTON II	6303	4310	4214	1754	2203	257
Maison du Peuple 11	999	701	684	472	185	27
Maison du Peuple 12	968	673	659	445	182	32
Maison du Peuple 13	920	678	665	444	189	32
Coligny 14	1378	1015	993	502	444	47
Coligny 15	1177	854	832	413	372	47
Coligny 16	1134	794	772	371	369	32
Alphonse Daudet 17	1195	844	834	280	507	47
Alphonse Daudet 18	1180	806	796	257	485	54
Breuil-Mingot 19	550	448	435	208	201	26
Petit-Tour 20	1422	1065	1033	454	530	49
Saint Exupéry 21	1604	1235	1199	451	694	54
CANTON III	12527	9113	8902	4297	4158	447
Hotel de Ville 22	1204	855	835	565	211	59
Hotel de Ville 23	1155	816	797	544	184	69
Hotel de ville 24	1145	773	748	514	179	55
Paul Blet 25	1551	1109	1077	551	465	61
Saint Cyprien 26	1305	982	960	350	557	53
Saint Cyprien 27	1277	957	944	350	544	50
Clos Gaultier 28	1133	805	779	285	455	39
Clos Gaultier 29	1067	789	755	262	454	39
CANTON IV	8837	7086	6895	3421	3049	425
Jules Ferry 30	1336	930	913	522	330	61
Jules Ferry 31	1461	1035	1006	564	390	52
Ernest Perrochon 32	1334	890	859	397	402	60
Ernest Perrochon 33	1166	837	806	374	386	46
Ernest Perrochon 34	1210	860	831	375	387	69
CANTON V	6507	4552	4415	2232	1895	288
TOTAL POITIERS	42297	30244	29481	13845	13910	1726

 
Deux listes restent donc en course pour le second tour: la gauche contre la droite, la liste "Poitiers Avenir" étant éliminée. Cependant, avec 65 voix d'écart, rien est joué et cette liste, en position d'arbitre, fait le choix de ne pas donner de consigne de vote pour le second tour du Dimanche 20 Mars 1977, où les choses vont se décanter:

Bureau de vote	Inscrits	Votants	Exprimés	PCN	AVCP
Condorcet 1	1406	1095	1079	479	600
Condorcet 2	1390	1084	1066	421	625
Condorcet 3	1362	1065	1049	414	635
Condorcet 4	1396	1124	1102	457	645
Montmidi 5	1569	1213	1200	572	628
CANTON I	7123	5581	5496	2363	3133
Jardin des Plantes 6	959	703	693	397	296
Jardin des Plantes 7	904	670	658	359	299
Charles Perrault 8	1595	1203	1189	443	746
Charles Perrault 9	1461	1080	1067	423	644
Charles Perrault 10	1384	1008	999	354	645
CANTON II	6303	4662	4606	1976	2630
Maison du Peuple 11	999	738	727	507	220
Maison du Peuple 12	968	732	722	485	237
Maison du Peuple 13	920	708	696	471	225
Coligny 14	1378	1071	1061	542	519
Coligny 15	1177	905	896	451	445
Coligny 16	1134	865	849	383	466
Alphonse Daudet 17	1195	899	883	297	586
Alphonse Daudet 18	1180	866	859	285	574
Breuil-Mingot 19	550	473	468	228	240
Petit Tour 20	1422	1138	1125	494	631
Saint Exupéry 21	1604	1318	1299	499	800
CANTON III	12527	9712	9585	4642	4943
Hotel de Ville22	1204	927	910	628	282
Hotel de Ville 23	1155	880	872	632	240
Hotel de Ville 24	1145	851	834	595	239
Paul Blet 25	1551	1201	1186	606	580
Saint Cyprien 26	1305	1033	1017	366	651
Saint Cyprien 27	1277	1003	989	343	646
Clos Gaultier 28	1133	883	870	303	567
Clos Gaultier 29	1067	844	827	283	544
CANTON IV	9837	7623	7505	3756	3749
Jules Ferry 30	1337	1001	984	582	402
Jules Ferry 31	1461	1099	1079	619	460
Ernest Perrochon 32	1334	995	976	438	538
Ernest Perrochon 33	1166	906	893	427	466
Ernest Perrochon 34	1210	909	887	403	484
CANTON V	6508	4910	4819	2469	2350
TOTAL	42297	32488	32011	15206	16805

Le 20 Mars, la gauche l'emporte à Poitiers, une première depuis trois décénnies:La Nouvelle République, Lundi 21 Mars 1977

Le conseil municipal est installé le 25 Mars 1977. Jacques Santrot est élu maire de Poitiers jusqu'à 1983.

PS: au niveau national, triomphe de la gauche dans tout le pays: la gauche controle désormais 156 villes de plus de 30.000 habitants. Ce phénomène politique a depuis été baptisé "La Vague Rose".

Précédemment:

-Les élections municipales de 1971.

A suivre:

-Les élections municipales de 1983.

-Les élections municipales de 1989.

-Les élections municipales de 1995.

-Les élections municipales de 2001.

Lors de la précédente séance, nous vous avions parlé de "Deep Throat" et de son contexte de réalisation au cours de l'année 1972, en vous parlant de "résultats spectaculaires". Le film, réalisé avec un buget médiocre, va réaliser 600 MILLIONS DE DOLLARS DE RECETTES. Aux Etats-Unis, durant la première  présidence Nixon, alors que le conflit au Viet Nam s'éternise et que les Boys reviennent fréquemment du continent asiatique les pieds en avant, et très souvent complètement traumatisés, ce sont plus de 10 millions d'Américains et d'Américaines (ou moins, pour ceux qui ont vu le film plusieurs fois...) qui se prennent de passion pour ce film atypique. Le succès, inattendu, est planétaire, si bien qu'une revue new-yorkaise,le New York Rewiew écrira:"La pornographie est le plus grand évènement de cette décade." Linda Lovelace devient alors en très peu de temps la première "porn-star" du 7 ème art. Quelques années plus tard, Linda dans des livres va décrire l'envers du décor du tournage, jusque là totalement insoupçonné: elle parle de viol :"Quand vous regardez de film, vous me regarder en train de me faire violer." Ces propos restent contredits par Damiano (le réalisateur) et son équipe.
Damiano quant à lui va se lancer dans la réalisation de film pornographique, s'étant désormais trouvé une nouvelle vocation, qui plus est rentable!

En 1974, on reparle de nouveau de "Deep Throat", mais dans un sujet a des années lumières du film: Richard Nixon (républicain) est réélu en 1972 pour un second et dernier mandat allant jusqu'en 1976. Mais rapidement, pendant et après cette réélection, de nombreux soupçons de cambriolage des locaux du Parti démocrate pèsent sur les Républicains, Nixon se retrouvant accusé d'en être l'instigateur (et le bénéficiaire!). Deux journalistes du Washington Post , Carl Bernstein et Bob Woodward enquêtent et tombent sur un indic qui organise la fuite de ces informations top secrètes dont Woodwardlui donna pour pseudonyme..."Gorge Profonde"! Ces informations vont servir à la commision d'enquêtes sur ces faits dès Mars 1973, qui aboutira à cette conclusion: Nixon est coupable (après avoir nier les faits) et doit démissionner, car une procédure d'Impeachment est lancé contre lui. Nixon remet sa démission le 9 Aout 1974.

Quant à l'identité de Gorge Profonde, c'est le magazine Vanity Fair qui révèlera son identité en Janvier 2005: Mark Felt, directeur adjoint du FBI sous Nixon. Aucune contestation n'a vu le jour depuis cette dernière révélation.

Sources: WIKIPEDIA "Scandale du Watergate"
                 
                  Marc GODIN "Pleins feux sur...Emmanuelle", 2005

Bonne semaine à toutes et tous!

1971: la France vit dans les Trente Glorieuses. De Gaulle est mort depuis Novembre 1970, Pompidou est Président depuis Juin 1969 tout comme son Premier Ministre, Chaban-Delmas, maire de Bordeaux depuis 1947, qui tente d'imposer son projet de "Nouvelle Société". Le pays, sous l'impulsion de Pompidou se modernise à très grande vitesse: équipements, transports, logements, technologies...
La gauche est en poussière, depuis 1968. La SFIO a disparu depuis 1969 au profit du PS; le PC réalise encore plus de 20% aux élections.
A Poitiers, les choses vont de même; cependant l'année dite "scolaire" 1970-1971 n'a pas été de tout repos, bien au contraire! Poitiers a grandi depuis la fin des années 1950. Son campus universitaire, qui se développe a l'Est de Poitiers, et se trouve coupé par la RN 151 que doivent traverser certains étudiants pour se rendre au R.U. Des accidents piétons-voitures vont avoir lieu ce qui va semer le trouble dans la vie universitaire avec un mouvement étudiant, des manif...Bref la ville de Poitiers va le temps de quelques mois perdre son calme habituel (Le mouvement étudiant de 1970-1971 est d'ailleurs le sujet de mémoire de Jules, qui a posté un calendrier du ou des mouvements sur son blog.
Lors de ces municipales de 1971, deux listes: celles de Pierre Vertadier, maire depuis 1965, pour la droite avec la liste "UDR élargie", l'autre de gauche "Union pour une gestion moderne, sociale et démocratique de Poitiers", dirigé par le PCF, avec Tony Lainé en tête de liste.
Sur la campagne à proprement parler, peu de faits particulier (la NR parle alors d'une "campagne sans passion): le 1 er tour a lieu le Dimanche 14 Mars 1971. Voici les résultats:

POITIERS           35169 Inscrits  22794 Votants  20568 Exprimés  2229 Nuls et Blancs

POITIERS NORD    17947 Inscrits  11691 Votants  10582 Exprimés  1111 Nuls et Blancs
   
    Liste Tony Layné: 3685 Voix     Liste Pierre Vertadier: 6887 Voix

POITIERS SUD      17222 Inscrits  11103 Votants    9986 Exprimés   1118 Nuls et Blancs
   
    Liste Tony Lainé:  3262 Voix     Liste Pierre Vertadier: 6724 Voix

TOTAUX :
Liste Lainé: 6957 Voix    Liste Pierre Vertadier: 13611 Voix

Majorité absolue: 11397 Voix. La liste de Pierre Vertadier est réélue dès le premier tour.

PS: au niveau national, le scrutin a été marqué par une forte stabilité des mairies: peu de surprises lors de ce scrutin. La droite reste majoritaire dans le pays lors du second tour le 21 Mars 1971.

A suivre:

- Les élections municipales de 1977.

- Les élections municipales de 1983.

- Les élections municipales de 1989.

- Les élections municipales de 1995.

- Les élections municipales de 2001.