20.000 manifestants déferlent sur Poitiers
Une semaine après la déferlante historique du 28 mars, les anti-CPE ont réussi la passe de deux. Près de 20.000 personnes otnt à nouveau défilé, hier, dans les rues de Poitiers.
14h: Dans le périmètre du stade Rébeilleau, hier, une seule question est sur toutes les lèvres: la mobilisation sera-t-elle à la hauteur de celle, qui, la semaine dernière, a valu au mouvement anti-CPE de devenir la plus importante manifestation sociale de toute l'histoire poitevine?
14h40: Comme la semaine passée, les étudiants ouvrent le cortège derrière deux imposantes banderoles. Ils chantent "On n'est pas fatigués". Le ton est donné.
15h: Le cortège s'étire et s'approche de la Pénétrante. Les membres de la coordination étudiante, aux porte-voix, lancent un appel à la mobilisation pour le blocus de ce matin. Les premiers observateurs, postés sur les ponts, sont optimistes: "La manifestation est géante. C'est comme la semaine dernière."
15h30: Le cortège glisse sur la Pénétrante. Les étudiants mènent la manifestation, au diapason. Les nez rouges, épaulés par le service d'ordre des syndicats, encadrent parfaitement le mouvement. Les policiers, eux, sont beaucoup plus nombreux que la semaine passée. Les étudiants aprennent que 85 CRS sont en ville. Les policers savent déjà depuis longtemps que la gare sera envahie en fin de manifestation. Ambiance détendue.
16h: L'immense cortège atteint le boulevard Chasseigne. Au loin, sur les hauteurs de la pénétrante, on aperçoit les drapeaux des syndicats. Slogans et chants ricchent sur les hauteurs poitevines: CPE, Chirac Villepin, précarité..Depuis une semaine et malgré l'intervention présidentielle, rien n'a changé. Les Poitevins sont toujours dans la rue. Toujours aussi nombreux. Toujours aussi déterminés. Leur nombre: 12.000 selon la police, 28.000 selon les syndicats. A 20.000, on se rapproche sans doute de la vérité.
16h30: Le cortège arrive Porte-de-Paris. Le signal est donné. Les étudiants quittent la manif en courant et envahissent les voies de chemin de fer en passant par le pont, les syndicats ne suivent pas. Les policiers, eux, ne bougent pas.
16h50: Des centaines d'étudiants marchent sur les voies. A la gare, les attendent des CRS. Le commissaire Benoit Desmartin, du commissariat de Poitiers, va à la rencontre des étudiants. Ces derniers évacuent la gare sans l'occuper. Entre les "nez rouges", les CRS et les policiers, deux mots: respect et courtoisie (lire notre reportage en page d'information générale).
17h: Le cortège, pendant ce temps, a continué. Il se reforme à la gare et prend la direction du centre-ville. Les 20.000 Poitevins ne lâchent toujours rien. Prochain rendez-vous ce matin aux portes de Poitiers, pour un nouveau blocus.
POINT CHAUD
Un lien entre les générations
L'histoire se souviendra du 28 mars et du 4 avril 2006. Jamais la ville de Poitiers, hormis à la Libération, n'avait connu une telle mobilisation. Jamais un même mouvement, dailleurs, n'avait rassemblé, à une semaine d'intervalle, autant de personnes, soit à chaque fois environ 20.000 mécontents déterminés. Et jamais, sans doute, autant de générations, de professions, de mouvements différents, d'obédiences diverses s'étaienbt retrouvés unis ainsi. De la Confédération paysanne, présente hier pour soutenir les étudiants, à des délégations d'entreprises châtelleraudaises, le rassemblement a rassemblé bien au-delà des limites habituelles. Hier, le mouvement anti-CPE, anti-CNE, anti-pas assez de postes aux CAPES, anti-gouvernement et surtout anti-précarité n'avait pourtant pas la même allure que celui de la semaine passée. Il y avait autant d'étudiants, certes, de lycéens aussi, de syndicalistes, de partis politiques, mais il y avait surtout de nombreux, très nombreux "anciens". Des retraités, des grands-parents, des "cheveux blancs" venus soutenir une jeunesse "sacrifiée, condamnée à payer les dettes de l'Etat et toutes les erreurs passées et actuelles". Personne ne sait jusqu'où ira le mouvement anti-CPE. Personne ne se risque à pronostiquer un essoufflement. Les étudiants et les lycéens tiennent le rang. Ne le quittent pas et ne dévient pas du chemin qu'ils ont tracé. "Ils étaient tous sortis en mai 2002 pour dénoncer Le Pen et après, ils sont retournés chez eux, ce sera la même chose pour le CPE", estimait un observateur. Peut-être, mais à la différence qu'aujourd'hui, c'est de leur avenir et non de leur honneur qu'il s'agit. Et les "anciens", de plus en plus présents à leur côté, l'ont très bien compris: cette génération CPE n'est vraiement pas la mieux lotie.
Les étudiants bloquent la ville ce matin
Les huit principales entrées de la ville seront bloquées ce matin par la coordination étudiante épaulée par l'intersyndicale. Les anti-CPE entendent désormais paralyser l'activité économique de la cité.
Comme ils l'ont déjà fait le 23 mars dernier créant une belle pagaille aux abords de la ville, les étudiants de la coordination de Poitiers sont bien décidés à bloquer de nouveau ce mercredi matin les neuf principales entrées de la capitale régionale (voir notre infographie ci-contre). Pour cette seconde action de blocus qui s'incrit dans la cadre d'une journée nationale de blocage dans l'ouest et l'est du pays, les étudiants poitevins recevront le soutien de l'intersyndicale qui a appelé à participer à l'opération. Les étudiants pourront également compter sur l'aide matérielle de la Confédération paysanne qui, au cours de la nuit, leu livrera un chargement de plusieurs dizaine de bottes de paille.
"Il faut désormais empêcher les gens d'aller travailler et même de consommer. Nous n'avons plus d'autre choix. C'est en paralysant le pays, jusqu'à ce que les gens se plaignent, que l'on gagnera", explique Stéphane Nicolas, de la coordination.
"Plus d'autre choix que d'empêcher les gens d'aller travailler"
"On en est arrivé à un point où occuper des locaux officiels ne sert plus à rien. Depuis le discours de Chirac, nous n'avons plus d'autre alternative qu'un blocus radical des villes", poursuit Grégory Hamed, autre étudiant membre de la cordination.
Même sentiment pour Anthony, 19 ans, étudiant en première année d'histoire de l'art: "Le blocus des facs ne suffit pas. Cela fait six semaines que la fac est bloquée et rien ne se passe. Plus on emmerdera les gens, plus il y aura d'écho". Conscient du risque de cassure avec l'opinion publique, les étudiants ont distribué hier 16.000 tracts expliquant leur action.
Si l'arrivée en ville de CRS venus renforcer les policiers locaux n'entame pas la détermination des étudiants, elle inquiète en revanche davantage les syndicats, à l'image de la CGT qui a donné des consignes à ses "délégués, militants et salariés protégés pour qu'ils se rendent sur les blocus afin d'éviter les frictions".
La Nouvelle République, Mercredi 5 Avril 2006.
Un petit bonus: mes photos d'une journée pas comme les autres. Et pourtant depuis, le record a été battu, en Mars 2009.
Article en cours de réalisation.
POITIERS - La mobilisation anti-CPE ne faiblit pas: 10000 selon la police, plus du double selon les manifestants
Manif hier, blocus ce matin
L'intransigeance syndicale ne faiblit pas, l'énergie des étudiants non plus. Hier les opposants au CPE ont fait une nouvelle démonstration de force à Poitiers. Ce matin, les syndicalistes vont se railler aux étudiants pour bloquer la circulation à Poitiers.
"CHIRAC a reconnu que la loi n'était pas bonne puisqu'il veut la changer et en même temps, il la promulgue", résume René Pintureau, de la CGT territoriaux. "Il y a confusion dans la tête des gens." Dans l'esprit des manifestants qui avaient choisi hier encore de descendre dans la rue et parfois de sacrifier une journée de travail, il ne semblait pas y avoir de doute. Malgré l'intervention du Président de la République et les promesses de modifications, les responsables syndicaux poitevins campent sur leur position: le retrait du projet de loi avant toute négociation. "Il y a un refus profond. Aujourd'hui, on peut mobiliser comme jamais", affirme Alain Barreau de FO86. "Aujourd'hui, personne ne peut emêcher un employeur d'embaucher quelqu'un en CPE, puisque la loi le permet. On demande que la loi ne le permette plus."
Dans une charte, les partis de gauche (alternatifs, LCR, PC, PS, Verts et LO) ont apporté leur soutien au mouvement étudiant et contre "la précarisation généralisée des salariés et en particulier des jeunes". Marc Loubaud, pour les parents d'élèves de la FCPE, rappelle que la "loi est faite pour défendre les faibles contre les forts".
Bloquer la ville
La menace de bloquer la ville ce matin et tous les matins qui suivent tant que le gouvernement n'aura pas retiré la loi plane toujours. Hier, les étudiants ont commencé l'organisation du blocus sur le même air que le mercredi 22 mars. Rendez-vous place d'Armes et à l'amphi J à 6h45 pour que des petits groupes se répartissent les points de la rocade à paralyser. Le rond-point de la route de Gençay, la Porte de Paris et le rond-point de Chasseneuil-de-Poitou seront les points noirs de 7h30. L'épreuve de force a commencé, sans craindre de prendre en otage les Poitevins qui iront travailler. "Il est important de faire un rapport de forces. Bloquer une ville à un moment T, c'est possible si on ne porte pas atteinte aux biens et aux persones", menace Alain Barreau. Christophe Massé pour la CGT appelle le plus d'adultes possibles à être présents sur les barrages auprès des étudiants, de façon à s'interposer et à éviter les violances éventuelles avec les forces de l'ordre. La préfecture de Poitiers a promis de "faire respecter la liberté d'aller et venir et apportera une réponse adaptée au phénomène".
M. Echo...
...a vu hier à la manif à Poitiers un chien paré d'un joli petit manteau. Dessus, on pouvait lire: Chien Précaire Embauche.
...a reconnu son ancien prof de maths au milieu des manifestants. Il n'a pas pu lui parler car il soufflait joyeusement dans sa clarinette...comme autrefois lorsqu'il détendait ses élèves pendant les cours.
...s'est retrouvé en fin de cortège hier après-midi avec les partis politiques locaux. Contrairement aux manifestants parisiennes, ce n'est pas là que l'on retrouve les casseurs. Encore heureux!
...s'interroge aussi sur la position de ces mêmes partis en queue de manif. Sont-ils là pour pousser la foule en colère ou sont-ils mis à l'arrière car trop politisés? C'est à l'appréciation de chacun. Mais dans les deux cas, le soutien a l'air sincère.
...a observé Christian Dudognon, président de l'association poitevine l'Eveil, et militant CGT, compter les participants à la manifestation contre le CPE. Faisant preuve d'une honnêteté sans borne, le sémillant comptable d'un jour retranchait systématiquement tous ceux qui faisaient machine arrière pour retrouver un camarade. Entre les additions et les soustractions et les nombreuses pauses pour lancer quelques blagues, pas sûr que les comptes soient certifiés fiables.
...a constaté que les manifestations se suivent et se ressemblent. l'autre mardi, les élus communistes de la ville de Poitiers (Jean-Jacques Guérin, Michel Bodin et Jean-Paul Dampuré) se sont retrouvés au bar le Victor-Hugo en fin de manifestation pour prendre une bière. Et hier, les élus communistes se sont retrouvés au même endroit, au même moment, pour une sanction identique. Allez, encore une manif et ce sera la tournée du patron.
Centre Presse, Mercredi 5 Avril 2006.
France 2, 20h, David Pujadas, Mardi 4 Avril 2006.