ETATS-UNIS
CE QUE SERA L'ENTREE OFFICIELLE EN FONCTION DE RONALD REAGAN
UNE SUPER-PRODUCTION HOLLYWOODIENNE
Un dessin de Tornade, La Nouvelle République, Samedi 24 Janvier 1981.
Washington. - Les républicains célébreront en grand style et à une échelle colossale leur retour au pouvoir et "l'inauguration" présidentielle (c'est le terme officiel) de Ronald Reagan, le 20 janvier, s'annonce comme une super-production hollywoodienne. Alors que Carter avait insisté pour que son inauguration soit un évènement populaire, celle de Reagan a déjà été appelée une inauguration impériale, comme le furent celles de Nixon et de John Kennedy. La plus chère de toutes jusqu'à nos jours, elle coûtera dit-on, près de sept millions de dollars, deux fois plus que celle de Carter.
Pour commencer, Reagan renouera avec la vieille tradition de prêter serment sur la Bible devant le Capitole, en chapeau à claque et habit à queue de pie, comme Eisenhower et Kennedy, tradition abandonnée depuis pas leurs successeurs, au profit du complet veston, plus pratique en fin de matinée. Reagan se fait faire à grand frais un habit, spécialement pour l'occasion par son tailleur de Hollywood et il a demandé à ce que tous les membres du Congrès et les officiels présents soient habillés de même, pour redonner, dit-il, à cette cérémonie son éclat et sa dignité.
Cette décision a particulièrement réjoui les magasins de location de fracs et d'habits de la capitale dont les affaires avaient beaucoup péréclité pendant le règne des Démocrates géorgiens de Carter, plus enclins aux blue-jeans et aux cols roulés. Pour la première fois, ils se trouvaient pris d'assaut et ont dû faire appel à leurs collègues de New York pour recevoir du renfort de matériel.
La cérémonie officielle sera suivie dans l'après-midi par le non moins traditionnel défilé inaugural, avec des unités militaires, des fanfares, des majorettes et des chars représentant les cinquante Etats américains. Ce défilé durera plusieurs heures et comptera plus de vingt mille participants venant de tous les Etats-Unis. Le soir, plus de quarante mille Républicains danseront avec un bel ensemble et encore en habit, dans une dizaine de bals différents répartis dans les grands hôtels et les musées de Washington, aux sons des meilleurs orchestres américains. Le président et la Fisrt Lady feront une apparition et un petit tour de piste à chacun de ses bals, à tour de rôle. Une seule exception: ils ne se rendront pas au bal Disco pour les jeunes, où la bousculade sera telle que la sécurité voulue ne pourrait y être assurée.
Enfin à minuit et malgré les températures sibériennes qui règnent généralement à Washington, en janvier, il y aura un immense feu d'artifice culminé par des portraits géants de Reagan et de son vice-président, George Bush, illuminant les cieux de la capitale. Un drapeau éclairé de cinq mille ampoule frottera aussi au-dessus du Capitole.
Des milliers de Républicains débarqués de tous les Etats-Unis, convergeront sur Washington pour l'occasion et inonderont littéralement la ville. Dès le lendemain de l'élection de Reagan, toutes les chambres d'hôtel de la capitale et des environs avaient déjà été retenues pour héberger ce raz de marée républicain. Les festivités commencent bein avant le 20 janvier et s'étalent pendant plusieurs jours au cours desquels réceptions, soirées, déjeuners, spectacles, concerts et cocktails monstres se succèdent à rythme accéléré, du matin au soir. Parmi elles, citons la réception des gouverneurs des cinquante Etats, le thé des Distinguished Ladies et un gala d'artistes sous la direction de Franck Sinatra.
Ces manifestations ont toutes une chose en commun: leurs proportions gigantesques car les plus intimes compteront au moins six mille personnes et certaines jusqu'à 15 et 20.000, ce qui présente des problèmes évidents de transports et de stationnement. Pour essayer de les résoudre, des douzines d'autobus feront des navettes continuelles pour amner les invités et les reprendre. Ils seront pour la plupart équipés de bars et d'orchestres, ce qui permettra aux passagers de supporter plus agréablement les inévitables embouteillages de circulation.
Le 19 au soir aura lieu un immense spectacle de gala pour dix neuf mille personnes et Franck Sinatra en sera le maître de cérémonie. Une pléiade de grandes vedettes de cinéma et de la chanson y participeront dont Jimmy Stewart, Elisabeth Taylor, Pat Boone, Charlton Heston, Bob Hope, Robert Stack, Stevie Wonder et bien d'autres. Pour transporter les invités sur les lieux, les organisateurs ont fait encore mieux: ils ont réquisitionné le métro pour la soirée, au coût de 300.000 dollars.
Ce sera donc une inauguration très animée et Washington s'est préparée fébrilement depuis des mois à ces journées de liesse républicaine. Il reste seulement à espérer que le temps sera de la partie et que les méchants blizzards et autres tempêtes qui s'abattent souvent sur la capitale américaine en janvier, épargneront les Républicains et l'heure du triomphe de Ronald Reagan.
Nelly STONE
La Nouvelle République, Samedi 17 Janvier 1981.