(De nos archives)
Peur du vendredi 13 ? Rue89, qui n’a peur de rien, vous dit tout sur cette phobie qui a un nom aussi imprononçable qu’un volcan islandais : paraskevidékatriaphobie.
Lourdes, vendredi 13 octobre 2000. Devant le bar-tabac-Loto, une file d’attente impressionnante. 45 minutes pour valider ce ticket de Loto qui ne peut être que gagnant. Dans la ville des miracles, tout le monde veut tenter sa chance pour le dernier tirage du XXe siècle tombant un vendredi 13.
Paris, vendredi 13 novembre 2009, dans la rue des Haies. Une vieille dame se plaint de ses maigres revenus. Son interlocuteur lui conseille d’aller jouer au loto :
« Je joue pas à ça moi ! »
« Oui mais aujourd’hui c’est vendredi 13. »
« Ah c’est vrai, j’y vais ! »
Selon les responsables de la Française des Jeux, interviewés par France Soir :
« Les semaines qui comportent un vendredi 13 voient leur chiffre d’affaires augmenter en moyenne de 25 % sur tous les jeux de la Française des jeux. »
Selon un sondage TNS Sofres, lorsqu’une semaine comporte un vendredi 13, « 75 % des joueurs attendent le jour même pour jouer à des jeux de La Française des Jeux et 52 % d’entre eux espèrent gagner un gros lot ». Il sera de 17 millions ce vendredi. Et comme 2009 compte trois vendredis 13 (ce qui ne s’est pas produit depuis dix et ne se reproduira pas avant trois ans), l’année est faste pour la Française des jeux.
La « paraskevidékatriaphobie »
Mais pourquoi le vendredi 13 est-il censé nous porter chance (ou malchance) ? Si vous êtes plus cinéphile qu’historien des religions, vous pourriez y voir un lien avec le cultissime film de Sean Cunningham.
Mais lui même a puisé ailleurs ce thème de la « paraskevidékatriaphobie » (c’est comme cela qu’on appelle la phobie du vendredi 13). D’abord il faut savoir que, d’un point de vue mathématique, le 13 tombe plus souvent un vendredi qu’un autre jour. Ceci pourrait expliquer cela, mais l’écart n’est pas significatif et ce serait frustrant.
Prenons le vendredi, tout d’abord. Il est, pour les chrétiens, le jour où Jésus est monté sur la croix. Mais la peur du vendredi, selon le site de mathématiciens Wolfram, ne serait apparue qu’au XIVe siècle, la première référence étant l’œuvre de Chaucer dans ses Contes de Cantorbéry. Les premières traces de craintes liées au vendredi 13, elles, n’apparaitraient qu’au XIXe.
Le 13 maintenant. Pourquoi certaines compagnies aériennes n’ont pas de 13e rangée de sièges et certains hôtels pas de 13e étage ? Pour les chrétiens toujours, le 13 n’aurait pas porté chance à Jésus pour son dernier repas, auquel il avait convié 12 personnes, dont Judas, auteur du fameux baiser.
Toujours selon Wolfram, l’origine pourrait être qu’il faut parfois un 13e mois de l’année aux calendriers lunaires pour se synchroniser avec le soleil, tandis que le calendrier grégorien se contente lui de ses 12 mois. Autre piste, plus récente encore et popularisée par le Da Vinci Code : l’arrestation de Jacques de Molay, dernier maître de l’ordre des Templiers, et de ses fidèles, par Philippe le Bel le vendredi 13 octobre 1307.
De Rome en Scandinavie
Déclinaison scandinave de la Cène, le dieu Odin avait réuni 11 de ses amis à table, oubliant bêtement le Dieu Loki, lequel s’auto-invita et, fâché, tua Balder, très populaire dieu de l’amour. D’où, encore une fois, l’idée qu’il ne fait pas bon être 13 à table.
Quant au vendredi, il sentirait le soufre en Scandinavie parce qu’il était dédié à la déesse Frigga (d’où, peut-être le Friday, « Frigga’s day » anglo-saxon), frivole déesse de l’amour, ce qui n’était pas du goût des chrétiens qui convertiront le pays et prétendront que le vendredi est le jour des sorcières de Frigga (on dira même dans certaines versions qu’elles étaient au nombre de 13 à se réunir).
Moins glamour, à Rome et en Grèce, selon le site l’Internaute, le 12 est tellement parfait (12 mois de l’année, 12 signes du zodiaque, 12 heures de l’horloge...) que le 13 ne peut être qu’imparfait, impur. Quant au vendredi, c’est le jour des exécutions des condamnés à Rome (d’où Jésus...).
Des effets concrets du vendredi 13
Toujours est-il que ces superstitions ne sont pas sans effet, selon le British Medical Journal. En 1993, des chercheurs ont montré qu’il y a proportionnellement plus d’accidents de la route les vendredis 13 que les vendredis 6 en Grande-Bretagne. Et que ces accidents ont 52% de chances en plus de conduire les personnes impliquées à l’hôpital...
Une étude néerlandaise de 2008 montre, à l’inverse, qu’il y a moins d’accidents, de feux et de cambriolages les vendredis 13 que les autres vendredis, les gens étant plus prudents ou sortant moins ce jour-là.
Enfin, selon une autre étude de Roach de 2004, entre 17 et 21 millions d’Américains seraient concernés par cette phobie. Et le vendredi 13 ne ferait pas la fortune de tout le monde. 800 à 900 millions de dollars seraient ainsi perdus chaque vendredi 13 aux Etats-Unis, certaines personnes préférant repousser leur décision d’achat, de voyage, mariage...