Le Front National part à l'offensive dans les villes moyennes
Les bons résultats du FN dans une législative partielle dans l'Oise témoignent de son travail d'implantation dans un contexte politique favorable.
LE MONDE | 23.03.2013 à 10h46 • Mis à jour le 24.03.2013 à 16h36 | Abel Mestre
Dimanche 24 mars, lors de l'élection législative partielle dans la deuxième circonscription de l'Oise, c'est Florence Italiani, candidate du Front national que Jean-François Mancel, l'insubmersible figure de l'UMP du département affrontera. La candidate socialiste Sylvie Houssin, arrivée en troisième position lors du premier tour, marqué par une forte abstention, a été éliminée. Mais ce résultat est-il vraiment une surprise,
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Depuis les cantonales de 2011 puis les scrutins de 2012, l'on sait que le FN se renforce dans ses bastions du nord du pays (l'Oise est une zone où le FN est fort), de l'Est et du Sud-Est tout en faisant des percées sur ses terres de mission de la façade ouest. Le parti d'extrême droite est devenu dans le même temps une force politique dans les zones périurbaines, où vivent ceux que Marine Le Pen appelle les "oubliés" et en direction de qui elle ne cesse de faire campagne. Car c'est là tout l'enjeu des élections municipales de 2014 pour le parti d'extrême droite.
Même si le FN entend se présenter partout et ne pas abandonner le chantier des grandes villes, ce sont les villes moyennes – entre 10 000 et 30 000 habitants – qui constituent la cible prioritaire du Front national. C'est dans cette catégorie que se trouvent les villes "prenables", comme Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), Tarascon (Bouches-du-Rhône), Carpentras (Vaucluse) ou Beaucaire (Gard). Mais, dans un parti qui manque de cadres, il faut partir très tôt en campagne, notamment pour pouvoir remplir les listes électorales aux municipales.
Alors, d'ores et déjà, les militants frontistes "boitent" (c'est-à-dire glissent des tracts dans les boîtes aux lettres), "font des marchés". Ces matériels conçus au niveau national veulent s'appuyer sur les problématiques de ces villes moyennes et des "oubliés".
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Avec une rhétorique déjà rodée. Des tracts similaires dans le Gard ou en Haute-Normandie évoquent l'augmentation des braquages "dans notre région". Les équipes locales le distribuent aux commerçants au moindre fait-divers.
D'autres, intitulés "Rendons la parole à la ruralité", dénoncent la fermeture des commerces, usines et services publics. Parfait pour les marchés de campagne. Une troisième série fustige la mondialisation et réclame "la priorité à l'emploi". Celui-là est idéal dans les zones de gauche frappées par les fermetures d'usine…
CLIMAT FAVORABLE
Ce travail militant n'est pas inédit. Le FN ne l'a pas inventé et n'en est pas l'unique détenteur. Mais le parti de Marine Le Pen est pratiquement l'un des seuls à le faire – sur les marchés, l'on croise aussi des militants Front de Gauche – à un an des municipales.
Pour l'instant, le FN bénéficie d'un climat suffisamment favorable pour réaliser de bons scores en 2014. Trois crises jouent en sa faveur. D'abord, la crise économique. Le taux de chômage bat des records et les solutions du gouvernement sont, pour le moment, sans effets. La crise de l'Union européenne ensuite. Les images des Chypriotes faisant la queue devant les distributeurs de billets renforcent un discours europhobe dont Mme Le Pen est la championne. Le climat de crise morale, enfin. Les affaires, entre la démission de Jérôme Cahuzac et la mise en examen de Nicolas Sarkozy, vont nourrir à coup sûr la mécanique du FN, qui a toujours prospéré sur le refrain du "tous pourris".
Abel MESTRE