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Spirit of the 1970's

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Articles, Photographies de Ludovic Bonneaud.
Sur une idée originale de Alexandre Lafréchoux.
"Je m'intéresse au passé
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Les Dossiers D'antan...

24 janvier 2014 5 24 /01 /janvier /2014 08:50

Portail-des-Augustins-Poitiers.JPG

VII. COMMENT ON ECORNA LES AUGUSTINS

 

ON avait perdu deux ans. Pour mieux dire: si le préft Mercier-Lacombe fût demeuré à Poitiers, il aurait considéré, sans doute, que deux années avaient été perdues. En fait, pour des raisons de principe ou d'intérêts, depuis deux ans, la construction de la Préfecture et de le rue Impériale, celle de la mairie, aussi, marquaient le pas.

Le préfet Alphonse Levert appartenait à l'espèce des conciliateurs. Depuis le 2 décembre 1851 où conseiller de Préfecture à Arras, il avait approuvé le coup d'Etat du Prince-Président, il faisait honorable carrière, passant successivement des sous-préfectures de St-Omer et de Valenciennes aux préfectures de Privas et d'Alger. Bon époux et bon père de famille, il inspirait confiance. Ce qu'il cherchait, dans le département de la Vienne où il espérait bien ne rien brusquer, c'était à faciliter la création d'un parti libéral et d'un parti conservateur. Il n'entendait "laisser en dehors de son action que les opinions extrêles et passionnées" (1).

Grellaud renvoyé, avec tous les égards, à sa chaire de la Faculté, Hastron installé à la mairie de Poitiers, il essaya de fixer l'attention des Poitevins sur la question du rachat du Marché Notre-Dame. C'était une manière adroite de calmer les esprits, tout en montrant au gouvernement qu'il avait, lui, Levert, aussi, des idées personnelles sur l'administration de son département.

Mais il fallut, très vite, revenir au problème essentiel et reconsidérer le dossier Préfecture - Rue Impériale. D'autant plus vite que si Hastron temporisait en guignant du côté de son propre jardin, dévalorisé par l'amputation d'un triangle de terrain, d'autres propriétaires possédant les immeubles dont les locataires quittaient les appartements, désiraient vendre. En particulier le père Chateau qui voulait se défaire de l'ancienne église des Augustins.

 

LA CONTEMPORAINE DE JEAN LE BON

 

Pour les Poitevins de 1965 qui voient rebâtir un grand magasin sur le Place d'Armes, il faut dire ce qui, il y a cent ans et plus, en tenait lieu. Et pour le dire convenablement, il faut citer De Chergé, traitant de l'histoire de l'église des Augustins "..fondée et bâtie en 1345, par Herbert Berland, 11e du nom, chevalier, Seigneur des Halles appartenant à 'une des plus anciennes familles de la ville de Poitiers, dont un grand nombre de membres ont été enterrés dans cette église..." Historien précis, De Chergé nous apprendra que le fondateur légua aux religieux 720 livres pour en achever la construction "par son testament du 18 septembre 1356 (veille de la funèbre bataille de Poitiers) et que le péristyle appliqué sur la façade devant le théâtre - il fut plus tard transporté à l'entrée du Musée de Chièvres où on peut toujours le voir - est sans doute l'oeuvre du Poitevin Girouard, au XVIIème siècle".

Mais ce péristyle, beau morceau de bravoure pour sculpteur, avec ses allures corinthiennes et ses chapiteaux d'acanthe, ne devait pas être à son goût. Non plus d'ailleurs, que l'église elle-même qui, "grande et sombre...n'avait qu'une seule nef et...point de voûte en pierre."

Il fallait, vraiment, que l'édifice fût laid pour que De Chergé le sacrifiât sans regret. Car, de ce monument contemporain de Jean Le Bon, l'archéologue sourcilleux parle avec une froide objectivité et, sans un frémissement de plume, note: "Cette église a été coupée dans sa partie occidentale, et diagonalement, en 1866, à l'époque du percement de la rue ex-Impériale".

 

LE BAZAR DES AUGUSTINS

 

L'Eglise des Augustins, selon De Chergé toujours, avait été, en 1860, métamorphosée en bazar. Elle occupait une superficie de 713.40m² en un rectangle principal de 50.60m de long sur 12m. de largeur environ auquel étaient accolées de petites constructions annexes. Le locataire en était Charles Parant qui l'avait transformée en un bazar où l'on trouvait la menue quincaillerie et les objets de ménage aussi bien que la corde ou la chandelle et qui, une ou deux fois l'an, passait dans le journal une réclame pour les lampes à pétrole. Car, l'éclairage au gaz pénétrait de plus en plus dans les maisons de Poitiers et il fallait bien écouler, fût-ce en soldes, les stocks de ce que Chalres Parant appelait "le nouvel éclairage minéral anglais".

L'affaire, à en juger précisément par ce qui, aujourd'hui, se nomme le budge de publicité n'était pas la plus importante du chef-lieu; mais elle bénéficiait de l'emplacement et Parant, économe, avec sa femme, ses propres enfants et ceux de sa femme car tous deux étaient veufs en premières noces, avec un vieux ménage de serviteurs et un jeune commis faisait prospérer son fonds.

 

LA BISSECTRICE D'UN ANGLE

 

"Le peuple se moralise en s'élevant au rang de propriétaire" avait écrit Piogeard dans "Le Journal de la Vienne" et Thibaudeau, tout en citant le journaliste de stricte obédience bonapartiste, renchérissait: "Aujourd'hui couvrir le pays de chalets, créer le plus possibles de modestes héritages, faire descendre dans les masses la moralité par beaucoup d'aisance et de bonheur, favoriser en un mot, la marche paisible du grand fleuve qui nous porte vers de nouvelles destinées, c'est résoudre sans tempêtes, par l'idée pratique, le grand problème que la théorie ou les applications politiques sont impuissantes à tirer du rêve ou de l'abstraction."

Cette phrase, tirée d'un prospectus publié par la Société Immobilière de l'Ouest, est significative d'un état d'esprit dont les adminisrateurs poitevins devaient tenir compte. Hastron tenta bien de pousser son Conseil municipal à l'abandaon du projet de construction d'une mairie sur la place d'Armes ce qui eût fait avorter celui du percement de la Rue Impériale, mais promptement il lui fallut faire machine arrière. Alors, avec Levert, on se livra à des tractations qui conduisirent j'usqu'à la construction, sur le plan où figuraient les deux axes - celui de Mercier-Lacombe et celui de Grellaud -, de la bissectrice de l'angle de ces deux axes. L'honneur était sauf pour les deux parties en présence, la géométrie, souveraine, et la rue projetée définitivement ne découpait plus de triangle dans le jardin de M. Hastron. Nous étions en 1863. En 1864, la ville de Poitiers achetait à M. Château le bazar des Augustins, en entier, pour 30.000F, gardait, pour la Rue Impériale 240m², et revendait les 470m² 40 qui restaient à Charles Parant moyennant 45000F.

Le bazar des Augustins était écorné, mais le mur refait sur la Rue Impériale: la Ville de Poitiers n'y avait pas perdu: Charles Parant devenait propriétaire. Jean Hippolyte Château se trouvait débarassé d'un immense édifice dont il tirait assez peu de revenus.

Le Préfet Levert, malgré un petit rappel à l'ordre de son Ministre pour cause de lenteur dans la réalisation des projets de construction, obtenait sa nomination pour Arras: avancement flatteur pour ce Picard qui avait, là-haut, commencé sa carrière.

Quant à Hastron, il se débattait dans des affaires personnelles très embrouillées qui allaient le conduire à une banqueroute retentissante et à Guenersey, où Arthur Ranc, cette mauvaise langue, rétendit qu'on l'avait rencontré en 1866 avec Lamirande, le caissier de la Banque de France à Poitiers. Lequel, notons-le en passant avait eporté la caisse...

Mais cela, c'est une autre histoire,  quoi qu'elle soit, elle aussi, de style Second Empire...

Bien entendu, la rue Impérial conduisait de la Place d'Armes à la nouvelle Préfecture: ou de la Préfecture à la Place d'Armes, les querelles de préséances s'étant éteintes, en six années...

 

Alain R. DANY

 

(1) A. PIOGEARD - Journal de la Vienne 21-3-1864

 

(A suivre)

 

Précedemment:

I. LA COURSE DE LENTEUR

II. LES REVES DES NOTABLES

III. UNE PREFET DESSINATEUR

IV. UN MATCH DE BILLARD ADMINISTRATIF

V. REPONSE ENTRE LES LIGNES

VI. LA GEOMETRIE SUBTILE

 

A suivre:

VIII. VOYAGE AUTOUR DE LA PLACE D'ARMES

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17 janvier 2014 5 17 /01 /janvier /2014 09:20

 

Logo Centre Presse 1982VI. LA GEOMETRIE SUBTILE

 

MERCIER-LACOMBE pouvait voguer vers l'Algérie, l'âme sereine. Il avait accompli, en un peu plus de trois mois, son devoir de préfet de S.M. l'Empereur Napoléon III. Poitiers, "ville morte", allait sortir d'une torpeur dangereuse pour le régime impérial.

Etaienr assurés, selon les normes politiques du moment: en premier lieu, le travail des ouvriers du bâtiment, pendant une assez longue période, trois ans au moins: au surplus, le prestige de l'administration centrale, puisque le représentant de l'Empereur serait logé dans un palais à la fois commode et somptueux, d'accès facile mais, éventuellement, facile à défendre, à l'extrémité d'une avenue en ligne droite et sur le rebord d'un côteau. Subsidiairement, la salubrité publique y gagnait, la démolition de quelques maisons vétustes permettant l'aération et l'ensoleillement de celles qui seraient conservées. Haussmann n'eur pas fait mieux. Mercier-Lacombe avait pris, aux bons endroits, ses références. C'était un très bon préfet.

 

UN ANGLE DECIDEMENT OBTUS

 

On a vu que, d'autre part, il ne prenait pas de grands ménagements et de quelle officielle façon répondait le Conseil municipal de Poitiers. On a vu, aussi que la réponse ne parvint jamais à Mercier-Lacombe ou que, en tous cas, celui-ci ne lui attribua aucune importance puisqu'elle fut produite en pleine période de mutations préfectorales.

Cependant, revenons quelque peu sur la délibération du Conseil municipal de Poitiers en date du 20 novembre 1860. Elle oppose, en fait, à une ligne droite tracée par le Préfet, une autre ligne droite qui possède entr'autres subtilités, celle d'aboutir dans des terrains dont le Préfet n'a pas prévu l'expropriation pour cause d'utilité publique.

Il s'agit, là, d'un coup fourré très classique qui ne possède d'autre vertu que celle de prouver la dignité des édiles et de rappeler au Préfet qu'il convient d'en tenir compte.

Mais, en même temps que la presse locale rendait compte de la délibération du Conseil municipal, elle produisait un rapport de l'architecte de la ville. Le document montrait, en apparence, tout le bon vouloir du maire Grellaud et respectait les desiderata préfectoraux. Il disait, en termes très administratifs, à peu près ceci: Monsieur le Préfet veut installer sa Préfecture à tel endroit? Parfait! Le maire a des raisons d'asseoir sa Mairie à tel autre? Bravo! Il est opportun, indispensable pour toutes sortes de raisons, de relier ces deux monuments par une voie. Je propose un tracé qui fera un angle de 145°15' et dont le sommet sera situé environ à mi-chemin...

Et l'architecte Boyer ajoutait une phrase délicatement ambiguë: "Cet angle offrira beaucoup plus d'attraits qu'une seule et même igne droite qui indique toujours son point d'arrivée. Lui, au contraire, nous fait rêver sur ce que notre oeil ne peut découvrir."

L'historien ne pourra, sans doute, jamais découvrir si Grellaud et quelques membres du Conseil municipal la soufflèrent au fonctionnaire ou si celui-ci l'écrivit par astuce ou par amour de l'art. En tous cas, elle attaquait le pouvoir central dans ses oeuvres vives et persiflait étrangement.

Le journaliste Piogeard, bonapartiste conséquent, n'y vit point malice mais le nouveau Préfet Alphonse Levert, plus averti des théories géométrico-tactiques de son gouvernement, dut s'en montrer inquiet. Le 9 avril 1861, par lettre très confidentielle, le Ministre de l'Instruction Publique et des Cultes, avertissait le Préfet de la Vienne que le Recteur de l'Université de Poitiers, l'abbée Juste, était chargé de "faire comprendre à M. Grellaud les inconvénients que (présentaient) le cumul de ses fonctions municipales avec ses fonctions de doyen de la Faculté de Droit et de professeur...

Le doyen Grellaud qui avait, baguère, approuvé l'angle obtus de son architecte possédait un sens suffisamment aigu des euphémismes pour savoir à quoi s'en tenir. Deux semaines plus tard (23 avril 1861), il rédigeait, sur le rebord du bureau préfectoral où il s'était appuyé pendant que le Préfet Levert lui confirmait les volontés ministérielles, une lettre de démission bien sentie: "J'ai apprécié, écrivait-il d'une main quelque peu tremblante - colère ou hâte d'en finir? - les motifs qui ont déterminé ( la mesure prise par le Ministre) et je n'ai pas dû hésiter à me soumettre à me soumettre à sa volonté..."

Ainsi drapé dans sa dignité, M. le Doyen Grellaud revenait, sur ordre, à ses chères études qui ne seraient plus,- le Ministre semblait y tenir beaucoup, - de géométrie.

 

LE TRIANGLE DE HASTRON

 

Le 4 juillet 1861, par décret de Persigny pris au Palais des Tuileries, Hastron devenait maire de Poitiers. Le pouvoir central avait usé de prudence et mis deux mois pour s'assurer de toutes les garanties. Pourtant, le rapport du Préfet Levert ne tarissait pas d'éloges. Charles Paul Hippolyte Hastron était ainsi présenté: "Pendant plusieurs années, maire de Couhé? Dévoué sans réserves à l'Empire. En 1849, au moment de la Législative, venait de refuser les frais de représentations au Président de la République, il écrivit au Prince que sur sa fortune personnelle, il mettrait une somme annuelle de 3000F. à sa disposition. Energique, initié aux affaires, il prendra franchement en main les affaires de la ville". Son revenu annuel était évalué à 30000F. (1)

Charles Paul, dit Hippolyte Hastron, banquier, possédait toutes les qualités pour diriger les affaires municipales. Son dévouement à l'Empire, cautionné par le Préfet, ne fit plus de doute lorsque parut la proclamation signée de lui qui, en grandes lettres noires sur fond blanc, fut affiché sur les murs de la ville et à la porte des églises (26 juillet 1861).

Hastron, cependant, n'approuvait pas le projet Mercier-Lacombe. Partisan convaincu d'un pouvoir fort et d'un politique de prestige qui s'exprimaient par des constructions somptueuses et des percements de rue en ligne droite, il n'en répugnait pas moins au tracé ordonné par l'ancien préfet. Scrupule d'élu du peuple? Avant d'être nommé maire par l'Empereur, il avait été choisi par ses concitoyens au suffrage universel. Mais l'homme, quoiqu'instruit, ne passait pas pour l'intellectuel et les querelles de droit public lui semblaient byzantines.

On se fut, donc, étonné de le voir suivre Grellaud dans la fameuse contre-attaque du 20 novembre 1860 si un document à couverture jaune qui sera publié en 1862 ne faisait état d'un certain triangle qui venait compléter la géométrie poitevine de ce temps-là, en s'ajoutant aux considérations de parallélisme, de symétrie, de ligne droite et d'angle obtus, longuement et subtilement évoquées.

Un triangle de 5m. 50 de base et 2m. 40 de hauteur. Un triangle, enfin que le tracé Mercier-Lacombe, entrant dans "la partie sud du terrain de M. H. Astron, banquier" lui enlevait!

Il n'en fallait pas davantage pour que "la voie du progrès" s'en trouvât infléchie.

 

Alain R. DANY

 

Prochain article:

COMMENT ON ECORNA LES AUGUSTINS

(1) Chapitre V.

(2) 9 millions de nos anciens francs.

 

Précédemment:

I. LA COURSE DE LENTEUR

II. LES REVES DES NOTABLES

III. UN PREFET DESSINATEUR

IV. UN MATCH DE BILLARD ADMINISTRATIF

V. REPONSE ENTRE LES LIGNES

 

Et ensuite:

VII. COMMENT ON ECORNA LES AUGUSTINS

VIII. VOYAGE AUTOUR DE LA PLACE D'ARMES

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20 décembre 2013 5 20 /12 /décembre /2013 09:03

IV. UN MATCH DE BILLARD ADMINISTRATIF

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La Place d'Armes de Poitiers en 1859, avant le percement de la rue impériale, un document unique reproduit avec l'aimbale autorisation de Centre Presse.

 

Le trait tiré par le préfet Mercier-Lacombe, sur le plan de Poitiers, entre le rue du Puygarreau et le côteau de la Visitation, allait provoquer la plus belle discussion de style administratif qui ait jamais opposé au XIXème siècle, la ville de Poitiers à l'autorité préfectorale.

Une véritable rencontre - au sens sportif du terme - eut lieu pendant deux années, dans toutes les règles d'un art qui tenait à la fois de la manille aux enchères et du jeu de billard. Annonces quelque peu surfaites et cartes forcées; longues périodes au cours desquelles chaque joueur marque seul des points tandis que l'adversaire attend la fin de la série en "frottant le procédé", telles nous apparaissent, aujourd'hui, les actions des deux parties en présence.

 

BILLE-EN-TETE

 

Or donc, Mercier-Lacombe avait attaqué, bille-en-tête: une Préfecture ici, une rue toute droite, dans l'axe, et, toujours dans l'axe, en face, une mairie...On l'imagine, mettant la mairie de Poitiers au courant:

-Vous m'obligeriez beaucoup, cher M. Grellaud, en voyant de très près cette question de la rue impériale...

Et ajoutant, avec une bonne grâce un peu condescendante:

-Peut-être pourriez-vous par voie de conséquence, si j'ose dire, pressentir une assiette pour votre futur hôtel de ville...

Henri Grellaud avait la soixantaine ombrageuse. Il était grave par complexion naturelle, du fait de son veuvage aussi et, endin, parce qu'il enseignait le droit à la Faculté. Pas de grands besoins et 7000 fr. de rentes déclarées: un certain désir d'indépendance, toutefois, qu'il avait manifesté en 1847 lorsqu'il s'était démis de sa charge de procureur du Roi et qui avait pu apparaître comme une opposition à la monarchie de Juillet. Il administrait la mairie de Poitiers depuis cinq années ayant du pouvoir central qui lui avait, au surplus, donné le décant de la Faculté de Droit.

Le préfet, avec toutes ses façons de colonisateur et cette intempestive manière de surcharger les cartes de géographie comme s'il se fût agit d'un désert africain ou de quelques ardents de porphyre en Provence, le préfet donc, révérence parler, importunait le maire et le doyen Grellaud.

Ce n'est pas que l'association des intérêts combinés de la ville et du département ne méritât une étude mais il y fallait mettre quelques formes et, en tous cas, y consacrer une longue période de réflexion.

 

UN COUP MASSE

 

Quand la déclaration de Mercier-Lacombe selon laquelle le nouvel Hôtel de Préfecture ne devait rien laisser à désirer "sous le rapport de la facilité des abords, des dégagements extérieurs, du voisinage et, autant que possible, de l'agrément du site" fut applaudie par le Conseil général, en août 1860, Henri Grellaud sentit peser la menace.

Décidément, le Préfet avait confiance dans la justesse de son premier coup d'oeil et, pressé d'en finir, usait de virtuosité devant un Conseil général complaisant ou obséquieux...

Quand, enfin, Mercier-Lacombe fixa au 1er janvier 1861, terme de rigueur, le vote par le Conseil municipal d'une grande voie de 16m. de largeur allant de la Préfecture à la Place d'Armes, alors Henri Grellaud pensa que ce coup massé, asséné par un joueur expert, ne devait pas rester sans riposte.

Il entreprit de rendre visite à ses conseillers municipaux pour leur exposer ses remarques et son plan.

 

Alain R. DANY.

Prochain article: REPONSE ENTRE LES LIGNES

 

Précédemment:

I - LA COURSE DE LENTEUR

II -  LES REVES DES NOTABLES

III - UN PREFET DESSINATEUR

 

A SUIVRE:

V. REPONSE ENTRE LES LIGNES

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10 décembre 2013 2 10 /12 /décembre /2013 12:17

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CIRCULATION BOULEVARD JEANNE D'ARC:
Des erreurs, mais certaines peuvent être corrigées...Circulation-a-Poitiers-en-178.JPG

 

 

"L'idée était bonne, mais pourquoi ces erreurs..? Ainsi parle un automobiliste, usager de la Porte de Paris, après les travaux menés sur le boulevard Jeanne d'Arc, et qui sont en voie d'achèvement.
En effet, il apparaît que si un nouveau plan de circulation semblait indispensable sur ce boulevard, on pouvait faire autrement et c'est "à l'usage" qu'on voit ce qui ne va pas. Alors procédons secteur par secteur.
Place Du Guesclin en premier lieu, pour noter qu'une "sucette" masque complètement la vue aux automobilistes.
Ensuite parlons circulation pour regretter cette interdiction de tourner à gauche à la ahuteur de la rue de la Chaussée, ce qui oblige les conducteurs désireux de se rendre rue des Trois Rois à tourner place Du Guesclin et à revenir par la rue de Grignon de Montfort. Bien sûr, il y aura des feux tricolores mais comme la rue Champagne est en sens interdit il faudra faire un détour pour poursuivre sa route vers le centre. Et puis comme de toute manière l'expérience prouve que les voitures passeront quand même par la rue de la Chaussée, c'est un risque supplémentaire d'accident.
Il est en effet démontré, qu'en dépit des indications du code de la route, le panneau "interdiction de tourner à gauche" est rarement respecté, il suffit de voir comment cela se passe rue Victor Hugo avec les voitures qui venant de la place Leclerc, coupent la bande continue en dépit du panneau pour se rendre rue Charles Gide.
Hier matin, nous avons vu un certain nombre de voitures couper à gauche et frôler l'accident. Il serait temps, que les conducteurs respectent le code de la route, mais il est aussi utile de les protéger contre leurs propres erreurs...
Il suffisait mardi d'observer la circulation pour se rendre compte qu'elle ne sera pas facile, même avec les feux tricolores. Il ne faut pas oublier en effet qu'il existe, côté droit en allant vers la gare, un certain nombre d'entrepôts d'où sortent quotidiennement des dizaines de camions qui doivent couper la chaussée et qui devront effectuer une manoeuvre difficile face à la hauteur de la place Du Guesclin. Pour l'automobiliste venant de la ZUP, et désirant monter au centre ville par la rue de la Chaîne, désormais il a intérêt, à passer par la place Montierneuf et la rue Jean Bouchet, le "détour" imposé par la rue Grignon de Montfort lui sera préjudiciable.

LA PORTE DE PARIS

Rendons-nous maintenant à la Porte de Paris, où il y a aussi de petits problèmes.
Un qui n'est pas nouveau, et qui concerne d'astucieux tricheurs. On constate journellement, qu'il se trouve des gens, qui, quand le feu est rouge pour se rendre route de Paris en venant de la gare, contourne la tour par le sens giratoire, car le feu, est à ce moment là vert pour monter à la ZUP. Le risque d'accident est certain mais il faut bien le dire, aucun panneau impératif indique au aux touristes ou à ceux qui connaissent trop bien le carrefour, que cette manoeuvre est interdite, puisque le carrefour se passe "à l'indonésienne".
Ce premier point précisé, et puisque l'on peint la chaussée en ce moment, on pourrait, sans doute allonger la bande continue avant la tour, pour séparer le sens Paris du sens ZUP, ce qui éviterait le spectacle quotidien de conducteurs surpris qui changent de file au dernier moment.

Une suggestion. Pourquoi ne pas peindre en totalité les bordures de délimitation de chaussée, pour les rendre plus visibles la nuit?

A leur sujet, on peut regretter, mais c'est un peu tard, leur largeur prise sur la chaussée et aussi le fait, qu'on aurait sans doute pu gagner quelques centimètres supplémentaires à cette chaussée, jamais trop large, surtout face à la tour au début du boulevard Jeanne d'Arc ou on voit à tout instant des conducteurs qui chevauchent le pointillé central qui réduit finalement la circulation à une voie...
Enfin, palons stationnement, pour dire que l'on aurait pu gagner des places supplémentaires, tout en évitant de faire des mini parkings de deux places qui n'apportent pas grand chose, sinon qu'on y voit toujours trois voitures dont la dernière à moitié...sur la chaussée!
Espérons, qu'une bonne signalisation lumineuse est prévue au début du passage séparé en deux sens, par les bordures centrales en ciment, sinon, on risque fort d'y retrouver très vite une voiture qui aura percuté le ciment central.
Il faut se souvenir, qu'en dépit d'une bonne signalisation lumineuse à la hauteur de la rue Blaise Pascal, sur l'avenue de la Libération, il s'y produit un accident pas mois.
Il vaut mieux protéger les imprudents que d'aller les chercher en ambulance...

Centre Presse, vers le 20 Mars 1978.

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6 décembre 2013 5 06 /12 /décembre /2013 13:55

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III.UN PREFET DESSINATEUR

Prefecture-Poitiers-vers-1860.JPG

 

Le Préfet Mercier-Lacombe vient de prendre en mains l'administration de la Vienne, en remplacement de M. Paulze d'Ivoy. Le département est calme n'ayant jamais connu que de très faibles remous, vite apaisés. Des agitateurs professionnels, passés par Poitiers en même temps que le Prince-Président en 1852, n'ont pas réussi à ameuter la population. L'opposition légitimiste autochtone est de trop bonne éducation pour parvenir à braquer les esprits contre le gouvernement impérial et l'Eglise, par son évêque, fort peu bonapartiste et farouchement ultramontaine n'exerce de véritable influence politique qu'aux confins du département, dans les Deux-Sèvres. Mercier-Lacombre ronge son frein. Périgourdin de vieille souche, il a longtemps travaillé en Algérie, dans l'ombre de Bugeaud. Il garde la nostalgie du soleil africain et de l'action, cette forme noble de l'entêtement.
Juillet fait criailler les martinets aux tours de la Cathédrale Saint-Pierre:
- Que faire à Poitiers?

RIEN NE BOUGE

Rien ne bouge, sauf les martinets. La ville mène sa petite vie tranquille. L'ouvrier du bâtiment gagne 3,50F (1) par jour à rafistoler les vieilles maisons et la miche de pain de 4 kilos vaut 1,14F. Au plus haut prix, les pommes de terre ont atteint 0,60F, pour un double décalitre. La taxe fixe à 1,30F, le prix du kilo de boeuf. La musique du 5e Lanciers joue pour tout le monde, une fois par semaine, au rond-point de Blossac. Ses chefs de service ont rapporté tout cela au préfet Mercier-Lacombe qui, plume en main, se remémore les détails de ses conférences matinales et, machinalement, dessine des arcatures de mosquées et de palmiers. Il murmure:
- Là-bas, c'est l'heure du muezzin. A Alger, Henriette-Marie Bell commence sa promenade crépusculaire. Mercier-Lacombe est amoureux de cette jolie Anglaise, fille du Consul général de la Reine Victoria.
Il l'épousera bientôt. Dans la corbeille de mariage, il mettra la villa de Cannes qu'il a fait bâtir au bord de la mer, et aussi, une rue, la rue Mercier-Lacombe que la municipalité de Draguignan a baptisée à son nom parce que sa célébrité de préfet était grande, entre les Maures et l'Estérel.
- Serai-je jamais célèbre, à Poitiers? s'intérroge Mercier-Lacombe, Et comment? Certes pas par des discours, en cette contrée où les juristes et les beaux parleurs pullulent...
Pour flatter les goûts de l'Empereur parle-t-il, néanmoins aux ouvriers? Mais quoi leur dire de mieux que ce qu'a déjà dit Olivier Bourbeau? Le maître orateur n'a-t-il pas coupé les effets présents et à venir de tous les extincteurs du paupérisme à Poitiers en s'écriant, certain jour de 1847: "Le titre d'ouvrier n'est pas sans honneur et sans considération. Le nom réveille l'idée de la constance dans le travail, de la fermeté et de la résignation dans la mauvaise fortune..."
Il n'y a rien à ajouter, en 1860.

UN TRAIT DE PLUME

Reste à verser une obole à toutes les quêtes, nombreuses, que l'on fera pour l'épargne du pauvre et à donner l'exemple afin que le produit en soit plus fructueux qu'il n'a jamais été.
Prudence, toutefois, dans ce pays de prudents! Prendre garde aux impairs car les notables poitevins ne lésinent pas quant leur charité est rendue publique par les journaux...
MERCIER-LACOMBE se lève. Autour de la Préfecture la rumeur du petit peuple laborieux s'est tue. Le crépuscule tombe. Par la fenêtre, l'odeur des roses minte dans la cour, le long du mur d'enceinte:
-Ah! ce mur qui bouche l'horizon. Et cette Préfecture, dans le creux de la ville, écrasée par la Cathédrale!
Brusquement, Mercier-Lacombe repense à ce problème du relogement des Archives départementales et de l'Inspecteur d'Académie. Paulze d'Ivoy, son prédécesseur, avait avancé une possible solution en proposant la construction d'une Préfecture, sur le terrain occupé par la caserne de gendarmerie et puis s'était enterré dans des complications telles qu'il avait préféré emporter le dossier à Nice à son départ de Poitiers. Mercier-Lacombe n'est pas de ceux qui aiment reprendre les projets de ses devanciers mais, ce soir, il lui apparaît qu'il pourra user d'une certaine originalité:
-Je vais bâtir une Préfecture, là où peu de Poitevins l'attendent. Il retrouve ses ardeurs africaines et cette fièvre de créer qu'on assouvit, là-bas, avec une carte de géographie et un crayon.
Au mur, précisément, s'étale un des nombreux plans, oeuvre du père Pichot, le lithographe, spécialiste des voies d'accession de la gare au plateau, auteur de projets d'embellissement de la ville, légitimiste sans doute aussi. Pas si sot que cela, ce doux entêté qui colorie en rouge l'embarcadère et, en vert, les voies grimpant, arrondies le rebord occidental de la falaise et puis foncent, toutes droites, vers le centre.
L'oeil de Mercier-Lacombe repère la place d'Armes et son petit rond central qui figure une fontaine vétuste et tarie, orgueil et dérision des Poitevins mais bon point de départ pour un tracé. Vers l'ouest, deux rues bordées de maisons que séparent des hectares de jardins, vergers, cours et remises. Le doigt du préfet, partant du petit rond, traverse les deux rues sans hésiter et passe, même, par delà une troisième, revient au petit rond, va vers l'Est, traverse une rue.
Mercier-Lacombe sourit, recule, cligne de l'oeil comme un artiste et tourne sa plume dans l'encrier. Puis revient au plan du père Pichot sur lequel d'un trait, net et droit, il joint les terrains du Puy garreau à ceux de la Visitation. Il crève les rues du Puygarreau, de la place d'Armes, des Hautes-Treilles et des Ecossais, il démolit les maisons et les serres, les toîts à cochons et les ateliers. Il place la Préfecture à l'Ouest, du côté des grands espaces, et l'Hôtel de ville, en face:
-Paulze d'Ivoy n'y vait pas pensé. Leur échevinage est une ruine. De l'air, de la lumière!
Mercier-Lacombe exulte: La rue? Ce sera la rue...Mias il hésite car il faut tout de même raison garder et donner à César ce qui doit lui revenir:
-Ce sera la rue impériale!

Alain R. DANY
Prochain article: un match de billard administratif

(1) Pour établir une comparaison avec nos prix actuels on peut mulitiplier par 3.
(à suivre)

 

Centre Presse, mi-août 1965.

 

Précédemment:

I. LA COURSE DE LENTEUR

II. LES REVES DES NOTABLES

 

A suivre:

 

IV .UN MATCH DE BILLARD ADMINISTRATIF

V. REPONSE ENTRE LES LIGNES


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4 décembre 2013 3 04 /12 /décembre /2013 08:27
Cette place là (Leclerc pour certains, d'Armes pour d'autres), elle existait encore il y a cinq ans. Tout juste une demie décennie. La nouvelle place, oui car pour quelques années on l'appellera ainsi est apprécié par les uns (plus de voitures qui l'utilisent comme un rond point), méprisée par d'autres (pour son revêtement qui est soit aveuglant, soit glissant les jours de pluie).
Alors, à l'occasion des fêtes de fin d'année, c'était le bon moment pour ressortir quelques photos des mois de décembre 2008 et de janvier 2009.
 Noêl Poitiers Place Leclerc
Dimanche 7 Décembre 2008, vers 16H40.Noêl Poitiers Place Leclerc
 
 
Noêl Poitiers Place Leclerc
Noêl Poitiers Place Leclerc
 
 
 
Mardi 23 Décembre 2008, vers 17h45.
 

Noêl Poitiers Place Leclerc
Noêl Poitiers Place Leclerc
Jeudi 25 Décembre 2008, vers 13h.
Noêl Poitiers Place Leclerc
Noêl Poitiers Place Leclerc
Dimanche 28 Décembre 2008, vers 9h10.
Noêl Poitiers Place Leclerc
Lundi 5 Janvier 2009, vers 17h45.
Noêl Poitiers Place Leclerc
Mardi 6 Janvier 2009, vers 9H40.
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29 novembre 2013 5 29 /11 /novembre /2013 09:20

II. LES REVES DES NOTABLES

Projet-escalier-gare-Poitiers-XIX-siecle.JPG

Le "Poitiers grandiose" tel que le rêvèrent Ch. de CHERGE ET PICHOT (Document des Archives de la Vienne), présenté par R. CROZET et "POITIERS et le chemin de fer". 

 

POITIERS comptait, en 1860, 26233 habitants. La vile occupait l'anse du Clain et débordait, par ses faubourgs, à l'Est vers Montbernage et Saint-Saturnin (Pont-Neuf); elle dépassait quelque peu la porte de la Tranchée, au sud, le long de la Route Impériale N°10 et, à l'Ouest, par delà la porte de St-Lazare (porte de Paris), grimpait le rude contrefort de la Cueille Mirebalaise. La voie ferrée de Paris à Bordeaux la bordait à louest et au sud-ouest, selon un tracé qui avait fait couler des flots d'encre mais qui, par contre avait nécéssité l'aaséchement d'un marais et la création d'un tunnel.

 

L'EMBARCADERE ET LA VILLE

 

Longtemps, près de dix années, de 1842 à 1850, on avait opposé au projet officiel (1) celui du passage du railway - on ne disait pas encore chemin de fer - le long du Clain, puis un autre par la Pierre-Levée, un autre, encore, dans la ville elle-même. On avait, aussi, discuté de l'emplacement de "l'embarcadère", on avait longtemps fait état de distances, de différences de niveaux, de prix de revient.

Et puis, on avait accepté, raisonnablement, une première gare en 1852 puis une autre, en 1855, sur l'emplacement qu'elle occupe aujourd'hui, au bord du boulevard du Grand-Cerf et au pied de la Visitation. Et l'on s'était mis, à qui mieux mieux, à disserter sur le rôle de la gare dans la vie poitevine.

Pour les hommes de la seconde moitié du XIXème siècle, et, singulièrement, pour les notables poitevins, la gare est le moteur de la vie citadine. C'est d'elle que vient la prospérité. Tous sont d'accord là-dessus.

De Chergé, légitimiste à tous crins, fait chorus avec un Orillard qui n'est pas le célèbre Arsène, lequel vit dans un provisoire et relatif effacement, mais qui, à l'exemple de ce dernier, doit-être modérément bonapartiste après avoir été convenablement orléanistes et en attendant de devenir opportunément républicain et qui, en tous cas, demeure conseiller de Préfecture.

Tous voient "des flots de voyageurs aller (de la gare) au centre même de la ville où les appellent de rapides affaires ou la nécessité d'un séjour plus prolongé". Tous affirment que si une rue du centre n'est pas mise en relation avec la gare, "elle sera un désert".

Il faut donc ouvrir Poitiers vers la gare: c'est vérité d'évidence et nécéssité vitale. C'est la grande oeuvre à accomplir auprès de laquelle le percement de la rue d'Orléans, en 1842, pour rattacher le coeur de la ville aux routes du Berri et du Limousin, le prolongement de la rue de Tison sous Blossac en 1846, le pavage des rues ne sont que broutilles et travaux secondaires.

Il faut aller de l'avant et regarder vers l'avenir. De Chergé qui est cartésien risque même une définition de l'avenir afin de se donner les prémisses d'un raisonnement solide: "prudemment envisagé, écrit-il (l'avenir) n'est pas autre chose que la vie de ce qui ne meut pas". Archéologue distingué, il le voit inscrit sur le sol de sa ville en ligne élégantes: notable opposant, il veut user de sa prudence, se réservant le droit d'écrire quand un projet aura été réalisé: "que ne nous a-t-on écouté? C'eut été beaucoup mieux!"

 

POUR UN POITIERS GRANDIOSE

 

Donc la création d'un Poitiers "grandiose" est à l'ordre du jour. Réputée "ville morte et sans industrie" en 1842, la capitale du Poitou ne veut pas se laisser dépasser par Tours qui a réussi une excellente opération en créant St-Pierre-des-Corps, non plus que par Angoulême qui bénéficie de l'appoint de sa fonderie de Ruelle. Poitiers donne dans le modernisme, assura à ses habitants, hygiène et confort. Elle ira jusqu'au luxe. On dispose de voitures "élégantes et bien servies" que l'on nomme "Les Pictaviennes" qui donnent "la facilité de visiter les amis et de circuler nuit et jour dans les rues, promptement, quelle que soit la rigueur de la saison"; il existe une compagnie d'assurances à primes contre les dégâts des toitures, un comptoir de banque et d'escompte, une boulangerie modèle, une fabrique de noir animal - à La Roche -  qui fournit des produits pour assainir les lieux d'aisance; des Pompes Funèbres qui assurent une garantie contre les épidémies en même temps qu'une certaine décence. Tout cela, c'est pour la salubrité publique et le mieux-vivre. La faim et les maladies pernicieuses ne sont plus à craindre.

Alors les notables poitevins se prennent à rêver pour eux-mêmes, et pour leurs pauvres - ceux du Bureau de Bienfaisance et de la Conférence de St-Vincent-de-Paul - pour les braves ouvriers, pour tous les habitants de leur ville et pour tous les visiteurs, promeneurs ou hommes d'affaires. Pour tous les hommes de l'avenir, ils rêvent de rampes d'accession symétriques qui, de chaque côté d'un escalier monumental, mèneraient de la gare au plateau, passeraient à travers des jardins suspendus d'ou la vue irait jusqu'à la Casette et ses peupliers frémissants, jusqu'aux amandiers de Montmidi.

Ils ont tous lu Jean-Jacques et M. de Lamartine. Ils sont poètes mais, par prudence, ils font durer leur rêves.

Dans son bureau de l'ancien évêché, à côté de la Cathédrale St-Pierre, le Préfet de la Vienne réfléchit. La place lui manque, en sa préfecture, pour loger les archives départementales. Au surplus, l'Inspecteur d'Académie réclame une pièce où pouvoir travailler. Et puis, célibataire mûrissant, le Préfet s'ennuie...

Alain R. DANY

 

Prochain article: III - UN PREFET DESSINATEUR.

 

(1) C.f; René Crozet "Poitiers et le chemin de fer". Bulletin des Antiquaires de l'Ouest 1958.

Centre Presse, Mercredi 11 Août 1965.

 

Précédemment:

I - LA COURSE DE LENTEUR

 

Articles suivants:

III. UN PREFET DESSINATEUR

IV. UN MATCH DE BILLARD ADMINISTRATIF

V. REPONSE ENTRE LES LIGNES

VI. LA GEOMETRIE SUBTILE

VII. COMMENT ON ECORNA LES AUGUSTINS

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22 novembre 2013 5 22 /11 /novembre /2013 08:58

L'auteur de l'étude dont la publication commence aujourd'hui a lu comme tout Poitevin conscient et organisé, indigène ou non, les fameux "Guide du Voyageur à Poitiers". Il les a lus dans le texte et les a retrouvés, parfois, dans les colonnes de la presse régionale, découpés en articles "bouches-trous".

Il éprouve, à l'égard de cette prose de la fin du XIXè et du début XXè siècle, beaucoup de respect, principalement quand elle traite d'évènemements moyennageux ou antérieurs à la bataille de Nouaillé-Maupertuis (1356). Toutes les histoires de ces temps très lointains, il les accepte de confiance. Il aime assez, d'autre part, que le plus ancien des auteurs et à coup sûr, le plus talentueux mette, en ses disgressions relatives aux faits qui lui sont contemporains quelque passion partisane. Une certaine forme d'aveuglement volontaire n'est pas à dédaigner, surtout si l'homme qui ferme les yeux sait en ouvrir un, parfois, pour cligner. Ce que fait de Chergé, à qui l'on tire, ici, un coup de chapeau.

Brothier de Rollières ne manque pas de mérites mais il fait étalage, au moins une fois, d'une méconnaissance redoutable de l'histoire poitevine de la fin du dix-neuvième, transformant en architecte un préfet, ce qui peut-être n'eût satisfait, ni l'un ni l'autre des personnages en question.

La mutation de Poitiers sous le Second Empire, devait être étudiée, cent anées ou presque après son accomplissement, oour rechercher le temps où les grands-pères de nos lecteurs d'âge mûr étaient de tout petits enfants et qui, à beaucoup d'égards, n'est pas du temps perdu.

 

I. LA COURSE DE LENTEUR

  Cathedrale-St-Pierre-Poitiers.JPG

"POITIERS se hâte lentement..." avait écrit un journaliste poitevin en 1848. De la difficulté que semblait éprouver la capitale du Poitou à s'adapter aux conditions du moment, le bon ton voulait qu'on fit des épigrammes. C'était un exercice intellectuel et rien que cela.Il n'empêchait nullement les uns de se résigner à une lenteur prétendue congénitale, les autres de cultiver cette lenteur, le plus grand nombre de la subir sans, d'ailleurs, en avoir conscience. Car Poitiers s'était installée, depuis longtemps, dans une molle quiétude après être durement entrée dans l'Histoire. Le Clain coulait, paisible, parmi les jardins fertiles. Le pain  et le vin venaient des champs tout proches. Les souvenirs des invasions dataient de quatre cents ans et les oppositions les plus vives, pour des questions religieuses, de plus de deux cents.

Or, Napoléon III régnait dont l'action politique n'avait pas l'agrément de l'intelligentsia poitevine, laquelle demeurait légitimiste pour une grande part. Ces juristes, ces propriétaires fonciers, frottés de droit et de belles lettres, étaient des gens qui ne manquaient ni de fortune ni de talent. Ils se voulaient hardis et patriotes mais respectueux d'un ordre des choses spécifiquement poitevin. Tout cela faisait que, désireux de modifier le visage, à la vérité, ridé et crasseux de leur ville, ils repoussaient tout plan d'urbanisme qui n'était pas le leur. Ils invoquaient la prudence et le bon goût pour argumenter. Les états descriptifs et estimatifs passaient au crible de leur dialectique: budgets, plans et tracés, matériaux prévus ou employés subissaient leur critiques grandiloquentes et naïves à force de subtilité. Elles bourdonnaient ces critiques, aux oreilles des administrateurs ou prenaient place, en forme d'articles bien construits, dans les colonnes du "Courrier de la Vienne et des Deux-Sèvres". Mais elles gardaient toujours le ton de bonne compagnie. De Chergé - car c'est à lui qu'il faut revenir chaque fois que l'on touche au Poitiers de 1840 à 1870 - et ses amis avaient la dent dure, la parole aisée, la plume facile et volontiers élégante; enfin, le coup de chapeau correct. Ce qui était, aussi, dans l'ordre des choses poitevin.

(A suivre)

Alain R. DANY

Centre Presse, Première décade de Août 1965.

 

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II - LE REVE DES NOTABLES

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VI.  LA GEOMETRIE SUBTILE

VII. COMMENT ON ECORNA LES AUGUSTINS

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POITIERS

Le 7 Janvier 2015,
PPP a reçu
depuis sa création
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Radio Old School

 RADIO OLD SCHOOL

Une rubrique exclusivement consacrée à de la musique "à l'ancienne" type Disco Soul Funk Electro 1990's et autres perles auditives.
Histoire pour les amateurs de découvrir un genre musical de qualité hélas disparu.
A l'écoute:
 

DEODATO
Skyscrappers
Album:
OS CATEDRATICOS/73 
(1972)

 

 
Le prix du pétrole à New York: 108$13

Pétrol Pop, Jean Yanne & Michel Magne, B.O. de Moi Y'en A Vouloir Des Sous (1972)

Vignette 1985

Vignette auto 1985

Vignette 1983

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