PPP, le blog intégral: tout sur tout et un peu plus que tout, d'avant-hier, d'hier, d'aujourd'hui et peut-être de demain!
L'instant cocorico de la trilogie: le taxi de 2015 est une Citroen DS. Et pas de chez Uber Pop...Pris sur offto55.com
"Retour vers le futur", le film
Production: Spielberg. Réalisation: Robert Zemeckis. Résultat: nul.
Un mauvais film renseigne davantage sur les intentions de son fabricant qu'un bon. C'est ainsi que Retour vers le futur, un des plus consternants navets qu'ait produits la bande à Spielberg, permet de lire, presque en transparence, les pensées et les systèmes de valeurs qui ont présidé à sa naissance: sacralisation définitive du teenager comme seul personnage du film possible et, par voie de conséquence, comme seul public possible; victoire de la fantaisie comme système esthétique dominant, aux dépens du bon vieux réalisme; sans oublier le recours, indispensable en ces temps de crise économique mondiale, aux deux carburants essentiels du moteur à faire rêver: le rock and roll et la science-fiction.
Si Retour vers le futur plaît tellement (il a battu tous les records d'entrées aux Etats-Unis), c'est aussi que c'est sans doute le premier film à théoriser à travers un scénario le nouveau rapport du teenager à la chose filmée: ayant depuis sa naissance eu l'occasion (ou la possibilité) de voir des images de lui-même, il est le premier spectateur de ce siècle à pouvoir envisager que sa propre biographie, son histoire personnelle, puisse entièrement avoir été filmée, pourquoi pas des évènements qui remontent à avant la naissance. A ce point, le scénario s'écrit tout seul: un gamin est projeté dans le passé, y rencontre ses propres parents et se rend compte avec horreur qu'il doit absolument les amener à coucher ensemble s'il veut avoir l'occasion de venir un jour au monde!
Belle idée, traitement baba-béat: comme si la force transgressive du sujet (la mère veut bien sû coucher avec le fils) obligeait les auteurs à une mise en scène pataude et empruntée, n'ayant pour fonction que de faire reculer le plus loin possible le spectre de l'inceste. Opération réussie à 100%: Retour vers le futur est le ramassis d'images le plus inoffensif que l'Amérique nous ait envoyé depuis des années. Quant à Bob Zemeckis, son amour des mouvements d'appareil pour rien, son manque de tempo absolu dans la direction d'acteurs, sa conception hystérique de la mise en scène (défauts aussi apparents dans A la poursuite du diamant vert que dans I Wanna Hold your Hand et Used Cars, tous deux produits par Spielberg) en font d'ores et déjà le prétendant idéal au titre de Tavernier américain.
L.S.
Libération, Mercredi 30 Octobre 1985.