PPP, le blog intégral: tout sur tout et un peu plus que tout, d'avant-hier, d'hier, d'aujourd'hui et peut-être de demain!
I l ne meurt jamais véritablement, parvient toujours à revenir aux affaires. L'homme politique. Depuis le retour de Napoléon au pouvoir avec les Cent-Jours de 1815, c'est un véritable art national. Depuis deux siècles, la liste est longue de ceux que l'on croyait tricard, définitivement grillé, et qui ont pourtant réussi à retrouver le pouvoir soit par le biais du suffrage universel, soit au coeur de circonstances dramatiques. Mais beaucoup aussi ont tenté, et échoué.
Rien que dans l'Hexagone, les plus grands ont souvent utilisé l'énergie de la défaite pour parvenir au sommet de la République: de Gaulle, Pompidou, Mitterrand, Chirac, Sarkozy, Hollande. Seul Giscard a connu la gloire, mais n'est jamais parvenu à effectuer un retour au premier plan, malgré de nombreuses tentatives infructueuses.
Christian Delporte, dans une analyse thématique nous décrit brillament ces divers parcours, en prenant appui sur de nombreux ouvrages, ainsi que des articles de presse. C'est une sorte de paradoxe français de se plaindre de ceux qui font de la politique une profession*, et pourtant, d'appeler ces mêmes personnes au pouvoir, en espérant trouver en lui le rôle du "sauveur de la Nation".
Un cas d'école: Nicolas Sarkozy
Un politique battu, décrédibilisé, mal-aimé, avec de la patience, et surtout des réseaux, ainsi qu'un bon appui médiatique a toujours l'espoir de finir par être rappelé. Tous, dans ce livre, ont eu leur traversé du désert. Ils ont attendu, tout en conservant cette flamme en eux. Par exemple, le cas Sarkozy, bien qu'il ne soit ni le fil rouge de l'ouvrage, ni le personnage le plus évoqué, exprime parfaitement cette soif du pouvoir. Dans le clan chiraquien dans les années 80, il bascule chez les balladuriens en 1993. Les présidentielles de 1995, avec la victoire Chirac, lui donnent la pancarte du traître. Il se retire, et à l'heure de la réconciliation au sein du RPR, reprend du galon, tout en ayant pris soin d'être réélu député de Neuilly. Après la dissolution de 1997, les vents lui sont plus favorables, mais voilà qu'il se vautre au européennes de 1999. Nouvelle traversée du désert, écriture d'un livre, puis de nouveau une montée en puissance au sein du RPR, Chirac voyant l'avantage qu'il peut tirer de ses services. Alors qu'il s'imagine à Matignon, le 21 avril 2002 modifie la donne, Chirac préférant Raffarin, ce dernier, alors inconnu du grand public, ayant selon lui une image plus "souple", qui divisera que de celle de celui qu'il appelle alors "Nicolas". De 2002 à 2007, malgré les bâtons dans les roues, un quinquennat d'impatience, il se forge une image de présidentiable. D'abord la conquête des militants, puis ensuite les Français. Victoire aux présidentielles de 2007. Puis défaite en 2012. Alors, comme beaucoup avant lui, il annonce le 6 Mai 2012 qu'il "porte toute la responsabilité de cet échec, et que désormais la place qu'il occupe " ne pourra plus être la même". Car pour revenir, il faut partir, mais pas n'importe comment (le fameux "Au revoir" de Giscard en 1981 est le cas typique de ce qu'il ne faut pas faire): en se retirant, il ne faut surtout pas insulter l'avenir, car les vents contraires peuvent tourner et devenir favorable. Et à titre personnel, je suis convaincu qu'il pense à 2017 depuis le soir de sa défaite. Oui, comme beaucoup avant lui, il espère que les Français verront en lui le sauveur.
Avec de nombreux exemples français, mais aussi quelques cas étrangers (Berlusconi en Italie, Churchille au Royaume-Uni, ou encore Nixon aux Etats-Unis), Christian Delporte nous dresse le portrait de ces combattants du ring politique au gré des plus grandes reconquêtes, comme celles évoquées précédemment, mais aussi des retours manqués, comme Giscard, Chaban, Barre ou encore Rocard. Précieux pour les historiens, mais aussi les amateurs d'histoires politiques, cet ouvrage au fond peut être un parfait manuel pour le personnage politique qui entame sa traversée du désert, avec une idée en tête.
Come Back! ou l'art de revenir en politique, 2013, 310p.
*: en complément, voici la charge de Michèle Delaunay, député de Gironde depuis 2007, contre les professionnels de la politique, avec son billet du 13 Septembre 2014.
En illustration, un article du JDD avec quelques tentatives de retours, ratés ou réussis.