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PPP, le blog intégral: tout sur tout et un peu plus que tout, d'avant-hier, d'hier, d'aujourd'hui et peut-être de demain!

Un récit d'un Poilu sur la guerre de 14 - 18 : "La Peur" , Gabriel Chevallier

la peur 201x300 Mascarade, de Gabriel Chevallier – éd. Le Dilettante

Les commémorations du Centenaire de la "Grande Guerre" sont une bonne occasion de redécouvrir les auteurs qui ont écrit sur ce conflit, tout en étant acteurs de ces combats. Je suis tombé par hasard sur une réédition de cet ouvrage que j'ai littéralement dévoré.

L'auteur nous propose de vivre les combats, les douleurs qu'il a vécu au travers d'un soldat nommé Dartemont, faisant partie de la "classe 1915", à savoir la génération née en 1895. Dès le début de l'ouvrage, Chevallier nous fait vivre le déclenchement des hostilités avec l'arrivée de "l'affiche" placardée dans toutes les communes de France, des espoirs et des craintes générées par ce conflit, où chacune des nations en guerre est sûre de sa victoire, de la justesse de sa quête. Avant que ne survienne la grande désillusion.

"Dans toute l'Europe, depuis les bords de l'Asie, des armées assurées de combattre pour une bonne cause et de vaincre, sont en route avec l'impatience de se mesurer contre l'ennemi.

Qui a peur? Personne! Personne encore...

Vingt millions d'hommes, que cinquante millions de femmes ont couverts de fleurs et de baisers, se hâtent vers la gloire, avec des chansons nationales qu'ils chantent à pleins poumons.

Les esprits sont bien dopés. La guerre est en bonne voie. Les hommes d'Etat peuvent être fiers!"

 

De l'Artois aux Vosges, en passant par la Champagne et l'Aisne, Gabriel Chevallier, à travers un soldat peu sensible à la hiérarchie raconte ses impressions, ses peurs, et parfois aussi, ses sympathies pour le soldat allemand, non pas pour ce qu'il représente, mais pour ce qu'il est au civil, ouvrier ou agriculteur, lui aussi happé par la machine de guerre. Et puis cette aveu qui est le fil rouge de l'ouvrage: la peur.

Ainsi, alors qu'il se trouve dans un hôpital, cet échange avec une infirmière, confrontant deux mondes pourtant, qui ni l'un ni l'autre ne se comprenne: l'avant et l'arrière. L'arrière, au coeur remplit par la propagande sur les combats héroïques des Poilus n'imagine en rien (la censure dans la presse et les courriers réduisent aussi la transmission de la réalité du front), tandis qu'avec les mois qui passent, les injustices et autres aberrations de la guerre (offensives inutiles et meutrières,...), les soldats se sentent dans la peau de condamnés à une mort certaine.

 

"Répondez donc. On vous demande ce que vous avez fait!

- Oui?...Eh bien! j'ai marché le jour et la nuit, sans savoir où j'allais. J'ai fait l'exercice, passé des revues, creusé des tranchées, transporté des fils de fer, des sacs à terre, veillé au créneau. J'ai eu faim sans avoir à manger, soif sans avoir à boire, sommeil sans pouvoir dormir, froid sans pouvoir me réchauffer et des poux sans toujours pouvoir me gratter...Voilà!

- C'est tout?

- Oui, c'est tout...Ou plutôt, non, ce n'est rien. Je vais vous dire la grande occupation de la guerre, la seule qui compte: J'AI EU PEUR."

 

Véritable pamphlet contre la guerre, "La Peur" a été publiée en 1930 avant d'être censurée en 1939. Dans la préface de 1951, Gabriel Chevallier réaffirme ses convictions pacifistes.


« Ce livre, tourné contre la guerre et publié pour la première fois en 1930, a connu la malchance de rencontrer une seconde guerre sur son chemin. En 1939, sa vente fut librement suspendue, par accord entre l'auteur et l'éditeur. Quand la guerre est là, ce n'est plus le moment d'avertir les gens qu'il s'agit d'une sinistre aventure aux conséquences imprévisibles. Il fallait le comprendre avant et agir en conséquence ».

 

Gabriel Chevallier, "La Peur", Le Dilettante, 1930, 350p.

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