A la Une de Centre Presse, Jeudi 6 Septembre 1984.
PARIS - M. Laurent Fabius se veut direct et strict: "on ne tourne pas autour du pot".
Pour sa première grande prestation télévisée de Premier ministre, mercredi soir, sur Anetenne 2, M. Fabius a mis en exergue, pendant une heure et demie, une devise: "dire la vérité", "rassembler", "moderniser".
La gauche a probablement sous estimé la dureté de la crise: "c'est difficile" et "ça va rester difficile", a reconnu le Premier ministre. Sans entrer dans le détail, il a tracé les grandes perspectives: "effort colossal" en matière de formation, "formidable effort" demandé aux entreprises avec pour obsession l'exportation, nécessité d'être strict sur le pouvoir d'achat - "on ne peut pas l'augmenter pour tous le monde" et combattre sur tous les fronts le chômage, "ce cancer affreux".
Une politique mais aussi le souci de se présenter lui-même aux Français, de lever le voile sur sa personnalité pour ne pas apparaître seulement un simple collaborateur du président de la République: "lui c'est lui, moi c'est moi, à chacun son caractère".
"J'ai toujours été socialiste" a-t-il clamé: "je suis pour la société organisée, qui agit avec efficacité en réduisant les inégalités. C'est ça le socialisme moderne. Egalité des chances mais récompenses des mérites".
M. Fabius a eu le souci de ne pas parler en technocrate - distinguant les "termes techniques" et le "Français", utilisant même des expressions très populaires. Et il a manifesté son refus "de tomber dans le gadget".
"Pour être l'homme de son pays, il faut être l'homme de son temps" a noté, citant Chateaubriand, Laurent Fabius, qui est apparu un peu tendu face aux caméras, mais n'a pas hésité à confier qu'il "n'a jamais entendu la Marseillaise sans frissonner".
Dans l'assitance: sa femme Françoise, ses principaux collaborateurs et les membres du conseil municipal du Grand-Quevilly auquel il appartient toujours.
Et déjà l'avenir: futur président? Premier ministre jusqu'en 88? Réponse: "tout cela c'est du marc de café".
Mais pour les législatives de 1986 M. Fabius se montre moins pessimiste qu'il y a quelques mois, pour la majorité au sein de laquelle il inclut toujours les communistes.
L'opposition: qu'elle "ne confonde pas le débat politique avec un concours de grossièretés", dit-il avant de réitérer ses offres de coopération et de conciliation.
M. Fabius, dans cet exercice de style, n'a pas manqué d'émailler son discours de quelques annonces: "On n'en restera là" avec le projet de référendum si le Sénat - comme il devait le faire dans la nuit - il opposait un nouveau refus, la baisse des impôts se poursuivra en 1986 avec la suppression totale de la surtaxe fiscale sur les hauts revenus et la loi sur la presse sera appliqué qu'après les élections législatives.
Centre Presse, Jeudi 6 Septembre 1984.
Résultat: budget de rigueur en 1985 comme en 2015
Augmentation des taxes sur le diesel et suppression de la 1ère tranche d'imposition pour les ménages, ainsi que baisse des charges des entreprises. En 2015, c'est vraiment le retour...vers le passé!
A la Une de Centre Presse, Jeudi 13 Septembre 1984.
Un extrait de l'intervention de Laurent Fabius
Enquête Le Monde/SOFRES Eté 1984:
82% des Français considèrent "que les hommes politiques ne disent pas la vérité"
Antenne 2, François-Henri de Virieu, Mercredi 5 Septembre 1984.