Adieu Camarade!
Le député socialiste Patrick Roy est mort
pour Le Monde.fr | 03.05.11 | 09h15 • Mis à jour le 03.05.11 | 10h01
Patrick Roy, député (PS) du Nord, est mort mardi 3 mai, à 53 ans. Il était ce qu'on appelle une "grande gueule" de l'Assemblée nationale : ses vestes de couleur – la rouge de préférence – et sa voix de stentor, de laquelle il interpellait régulièrement les membres du gouvernement en accolant à leurs fonctions un intitulé moins flatteur, en avaient fait une des personnalités les plus identifiables de l'Hémicycle. Le 26 octobre 2010, il avait été admis à l'hôpital Georges-Pompidou, à Paris, pour un cancer des voies digestives.
Cet instituteur, né à Denain (Nord) le 30 août 1957, militant politique et syndicaliste élu député en 2002, était un indiscipliné notoire. Et un homme de cœur et de convictions. A l'Assemblée nationale, il était membre de deux groupes d'études. Il présidait celui sur l'amiante, une affaire dont il suivait pas à pas l'évolution, se rangeant résolument au côté des victimes et relançant régulièrement les ministres chargés du dossier. Et il était membre du groupe sur la musique.
GUITARE ÉLECTRIQUE EN MAIN
La musique, son autre passion : le metal, plus particulièrement. A Denain, la ville dont il était maire depuis 2008, il avait créé un festival, les Métallurgicales, qui lui permettait de réunir dans une même manifestation la culture ouvrière de sa région et sa flamme pour le hard rock. Lors de la dernière édition, en juin 2010, toujours vêtu de sa veste rouge et guitare électrique en main, il était même monté sur scène pour interpréter un titre avec le groupe de metal rock Mass Hysteria.
Au début de son traitement, il avait tenu à informer ses concitoyens, par un simple communiqué, de son état de santé. Le 17 décembre, terriblement affaibli, il leur avait fait ses "adieux". Une ambulance médicalisée l'avait transporté jusqu'à Denain pour un bref aller-retour entre l'hôpital et sa ville.
Assis derrière une table sur la scène du théâtre municipal, il avait révélé sans détours aux quelque six cents personnes venues prendre de ses nouvelles la gravité de sa maladie : "Je souffre d'un cancer du pancréas. Les médecins m'ont dit qu'il ne me restait que quelques semaines, voire quelques jours à vivre." Il avait quitté la scène debout, soutenu par son épouse. "Excusez-moi de ne pas vous avoir accueillis à l'entrée, comme je le fais d'habitude, avait-il lancé avant de partir. J'ai un amour immense pour Denain. Jamais je n'aurais voulu être maire d'une autre ville. Je dois m'en aller maintenant. Surtout, buvez le verre de l'amitié." De longs applaudissements avaient salué son départ, que beaucoup croyaient sans retour.
FOI INALTÉRABLE DANS LA DÉMOCRATIE
Avec l'aide d'un nouveau traitement, Patrick Roy engageait alors un combat inégal contre la maladie, se promettant de revenir dans l'Hémicycle. Et, le 15 mars, quoique très affaibli, il effectuait son retour au Palais-Bourbon. Il témoignait alors pour toutes les victimes luttant, comme lui, pour la vie et remerciait l'ensemble de ses collègues pour le soutien et l'affection qu'ils lui avaient apportés. "Face à la mort redoutée, il y a la vie espérée. Ce souffle, vous me l'avez tous donné, tous, à gauche, à droite, au gouvernement. Jamais, jamais je n'oublierai. Dès demain, je redeviens un opposant farouche, mais je vais vous le redire : je vous aime toutes et tous. La vie est belle !"
La maladie reprenait cependant l'avantage. Le 4 avril, malgré sa fatigue et son extrême état de faiblesse, il recevait Dominique de Villepin, en déplacement dans le Nord, en sa mairie de Denain. L'occasion de rappeler sa foi inaltérable dans la démocratie et les valeurs humaines. Cet homme appelait un seul mot : respect.
Patrick Roger
Le retour de Monsieur Patrick Roy à l'Assemblée Nationale, le 15 Mars 2011.
A gauche la photo officielle de Patrick Roy à l'Assemblée Nationale pour la législature 2007-2012. A droite, au début de l'année 2011, le même Patrick Roy (prise sur FR3 Nord), victime d'un cancer du pancréas. Né en 1957, le député socialiste est mort à l'âge très jeune de 53 ans.
L'hommage du Parti Socialiste au député Patrick Roy
Hommage à Patrick Roy
C'est avec tristesse que les socialistes ont appris ce matin le décès du député PS du Nord Patrick Roy, survenu dans la nuit de lundi à mardi à 53 ans, des suites d'un cancer du pancréas. Martine Aubry lui a rendu hommage, évoquant dans un communiqué son "immense tristesse et saluant la mémoire d'un homme "généreux, sensible, courageux".
Vous pouvez rendre hommage vous aussi à Patrick Roy sur le mur du groupe coopol spécialement créé. Plusieurs témoignages de militants ou de sympathisants saluent le député: "tu vas rester dans nos pensées et nos coeurs", "Merci Patrick ! Merci pour tout ! Ta lutte n'aura pas été vaine, ton courage face à la maladie restera pour nous un exemple. Nous ne t'oublierons pas."
Benoît Hamon a lui aussi salué "un homme émouvant, un militant remarquable, et une gueule parmi les plus fameuses du Parlement" dans un communiqué.
"Je vous aime toutes et tous. La vie est belle!", avait lancé l'ancien instituteur, lors de son retour dans l'hémicycle le 15 mars après six mois d'absence.
En décembre, le maire de l'ancienne ville minière de Denain, député du Nord depuis 2002, avait parlé de sa maladie lors d'une réunion publique dans sa commune. L'ancien instituteur, réputé au Palais Bourbon pour son verbe haut et sa défense de la musique metal, avait fait l'objet de l'attention de nombreux élus, tous bords confondus.
Jean-Marc Ayrault, Président du Groupe Socialiste, Radical et Citoyen à l'Assemblée nationale se souvient:
"Du parti socialiste et de son groupe parlementaire, il a partagé toutes les exigences démocratiques et sociales. C’était sa seconde famille. Dans tous les mandats qu’il a assumés notamment à l’Assemblée nationale, sa voix merveilleuse de baryton portait la colère contre toutes les injustices mais aussi la croyance en un idéal de progrès qui dépasse et transcende toute le société. Patrick a été un député de combat, formidable de présence et de sincérité. Sa disparition laisse un vide immense pour nous tous."
Les socialistes adressent à sa famille, ses proches et ses administrés leurs sincères condoléances.
Une intervention de Patrick Roy à l'Assemblée Nationale en Mars 2010 concernant le festival du Hellfest. Evidemment, c'est une immense chahut provenant des bancs de droite qui a accompagné son intervention.